Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du mercredi 10 novembre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Premièrement, si vous avez raison d'évoquer la bonne tenue du taux de croissance, que vous estimez à 6,25 %, vous vous gardez de préciser qu'elle ne résulte pas d'une accélération mais d'un rattrapage. La France fait partie des trois pays européens qui ont connu en 2020 la plus forte récession : la croissance avait alors chuté de 8 %. Il faudra donc attendre fin 2022 – et encore ! – pour que l'on puisse espérer voir la richesse nationale retrouver le niveau qu'elle aurait dû atteindre si elle avait poursuivi sa trajectoire de 1,2 % ou 1,3 % de croissance annuelle.

Deuxièmement, le déficit structurel est en forte hausse. D'après l'article liminaire du texte, il atteindra à la fin de l'année 5,7 points de PIB, soit deux fois et demie plus que dans les années 2017-2019, où il tournait autour de 2,3 points. Comme l'a rappelé le président de la commission des finances, la crise ne saurait être tenue pour responsable : cette aggravation de 3,4 % du PIB, c'est-à-dire de 83 milliards, découle uniquement de votre gouvernance budgétaire défaillante.

Troisièmement, les 20 milliards de recettes fiscales supplémentaires n'ont pas été affectés à la réduction de ce déficit. Compte tenu des pertes de recettes non fiscales, vous auriez du moins pu mobiliser une quinzaine de milliards ; vous n'en avez rien fait. Le HCFP constate même que, contrairement à ce qu'il préconisait dans son avis du 17 septembre, ce surcroît de ressources n'est pas consacré au désendettement, mais au contraire à de nouvelles dépenses. Cette décision surprend d'autant plus le groupe Libertés et territoires que, dans le projet de budget pour 2022, le Gouvernement a fait le choix de cantonner ce qu'il appelle la dette covid à hauteur de 165 milliards et de s'engager à la rembourser « par les fruits de la croissance, dont résulteront les surcroîts de recettes ». Il semblerait donc, monsieur le ministre délégué, que vous ayez déjà résolu de ne pas appliquer votre propre doctrine.

Quatrièmement, vous réduisez artificiellement le poids de la dette publique. À la fin de l'année 2020, elle s'élevait à 115 % du PIB ; vous venez d'annoncer qu'elle atteindrait 115,1 % fin 2021, alors que le déficit effectif est de 8,1 % du PIB. Comment expliquer ce miracle, chers collègues ? D'une manière fort simple : en 2020, le Gouvernement a surfinancé le déficit à hauteur de 2,8 points de PIB – ce n'est pas moi qui le dis, mais M. Dussopt qui nous l'a déclaré en commission. Après tout, 70 milliards d'euros sont si peu de chose ! Grâce à ces opérations de trésorerie, comme il les baptise pudiquement, le Gouvernement dispose d'un matelas qui lui permet de dissimuler la forte augmentation de la dette en 2021, comme d'ailleurs en 2022. Abstraction faite du surfinancement, en effet, notre endettement atteignait 112,2 % du PIB fin 2020 ; fin 2021, ce sera 113,4 %.

En outre, en comptabilité maastrichtienne, le montant de la dette publique est minoré du fait du système des primes d'émission.

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