Il y a du bon et du moins bon dans ce projet de loi de finances rectificative ; il y a surtout un décalage entre l'urgence que vivent les Français et les Françaises, confrontés à l'envolée des prix de l'énergie, et les décisions que le Gouvernement décide enfin de prendre. Notons un bon point : une aide de 100 euros est destinée à ceux qui perçoivent moins de 2 000 euros par mois. Mais, si cet effort est significatif pour certains, il est évidemment beaucoup trop limité, notamment pour les ménages les plus exposés à la précarité énergétique. Nous avons déposé plusieurs amendements visant à porter le montant de cette aide exceptionnelle, pour les six millions de foyers qui bénéficient du chèque énergie, de 100 euros à 400.
Quel décalage entre vos propositions et la réalité que vivent les Français ! Nous célébrons aujourd'hui la première journée nationale de lutte contre la précarité énergétique. Rappelons les chiffres. L'hiver dernier, 60 % des ménages ont réduit leur chauffage, 25 % ont eu du mal à payer leurs factures, et 20 % ont eu froid. Qu'attend le Gouvernement pour agir ? Qu'attend-il, notamment, pour aider les ménages à engager des rénovations performantes globales et de grande ampleur, qui permettraient de diviser par trois ou quatre les factures énergétiques ? C'est de cela que les Français ont besoin, pas de se voir annoncer la construction d'EPR – réacteurs pressurisés européens – qui verront le jour dans quinze ans ! Il faut les aider à réduire leur facture d'énergie, et nous ne comprenons pas pourquoi vous refusez d'agir dans ce domaine. Vous nous répondrez certainement que vous avez créé MaPrimeRénov', mais seuls 0,1 % des dossiers concernent des rénovations globales, susceptibles de diviser par trois ou par quatre les factures d'énergie. Le Gouvernement peut faire beaucoup plus, en lançant un nouveau dispositif d'aide concentré sur les ménages les plus précaires, avec un reste à charge zéro. Il faut également renforcer les dispositifs MaPrimeRénov' et Habiter mieux sérénité pour les ménages les plus précaires, tant les chiffres sont ridicules : 50 000 rénovations performantes ont été réalisées en 2021 ! Nous ne pouvons nous en satisfaire.
Nous espérons aussi qu'un jour, vous vous déciderez à taxer ceux qui profitent de la crise énergétique : pour rappel, TotalEnergies a engrangé 4,8 milliards de dollars de bénéfice net au troisième trimestre 2021, et 11 milliards depuis le début de l'année – et encore, l'année n'est pas finie ! À longueur de communiqués financiers, ce groupe se félicite de sa bonne santé, qu'il doit à l'augmentation du prix du pétrole. Le Gouvernement ne peut rester sans réagir.
Enfin, il faut cesser d'accorder des subventions et des garanties aux projets de production d'énergies fossiles à l'étranger – malheureusement, nos amendements en ce sens seront probablement rejetés par la majorité. Nous avons souvent eu cette discussion ; chaque fois, vous avez expliqué que la France figurait parmi les meilleurs pays du monde en la matière. Mais aujourd'hui, la France est à la traîne. Dans le cadre de la COP26 qui se tient actuellement à Glasgow, tous les grands pays – sauf la France – se sont engagés à cesser de donner des garanties aux projets de production d'énergies fossiles et de charbon à l'étranger. La France porte le bonnet d'âne ! L'Allemagne et les Pays-Bas ont pris cet engagement hier, l'Espagne l'a fait aujourd'hui… Il ne manque plus que nous. Malheureusement, vous avez décidé de ne rien faire : ce PLFR en témoigne. C'est dommage. Lors de l'ouverture de la COP26, le Président de la République a appelé tous les pays à agir ; résultat : les autres l'ont fait bien plus fermement que la France. Nous sommes en voie de nous classer parmi les pays à la traîne. Il est temps de réagir. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre délégué, pour relayer cette parole.