Intervention de Cécile Untermaier

Séance en hémicycle du mercredi 17 novembre 2021 à 15h00
Améliorer la protection des lanceurs d'alerte - rôle du défenseur des droits en matière d'alerte — Présentation commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

Je tiens tout d'abord à saluer la façon dont Sylvain Waserman a travaillé : les propositions de loi ont été construites de manière transpartisane, en compilant tous les textes qui pouvaient être utiles. En plus des observations formulées par le rapporteur, permettez-moi d'insister sur la transparence dans laquelle les textes ont été élaborés. Il me semble que tous les gouvernements pourraient s'inspirer de cette démarche : nous savons comment les propositions de loi ont été écrites et qui a été invité à en discuter. C'est une dimension tout à fait essentielle et novatrice.

Le concept même de lanceur d'alerte remonte au XIXe siècle. Les États-Unis sont précurseurs. Il s'est plus développé sous l'impulsion de l'Union européenne, du Royaume-Uni ou encore d'autres États membres que sous celle de la France, mais nous avons rattrapé notre retard avec la loi Sapin 2. Monsieur le rapporteur, je salue d'ailleurs la décision de ne pas en minorer les avancées : en appliquant le principe de non-régression qui figure dans la directive, vous n'avez pas hésité à la surtransposer pour maintenir la notion de lanceur d'alerte dans la dimension voulue par la loi Sapin 2. Les présents textes permettent d'aller plus loin que la directive ; nous saluons cette volonté.

Les propositions de loi peuvent se résumer en trois points majeurs. Tout d'abord, elles procèdent à une redéfinition du lanceur d'alerte : la notion de désintéressement laisse place à celle de contribution financière directe. J'ai fait part des quelques réserves de notre groupe tout en comprenant l'objectif d'éviter les « chasseurs de primes ». Lors de son audition, Frances Haugen a mentionné la possibilité d'une rémunération des lanceurs d'alerte par des dons ; nous nous sommes demandé si la notion de contribution financière directe les incluait.

Deuxième point : la procédure est claire avec une voie interne et une voie externe. Après épuisement de l'un de ces canaux, la divulgation au public peut intervenir. Ce dispositif est de nature à rassurer les entreprises et les administrations. De plus, mettre fin à la hiérarchie entre les voies interne et externe est vertueux : cela incitera les entreprises et les administrations à instituer un canal interne.

Enfin, les textes accordent une protection renforcée au lanceur d'alerte et aux facilitateurs. C'est l'objet même de la loi que d'éviter que ceux-ci, œuvrant pour l'intérêt général, soient broyés par des forces contre lesquelles ils n'ont pas les moyens de lutter. Le lanceur d'alerte sera soutenu contre les procédures bâillons et les représailles, il pourra avoir recours à un facilitateur et bénéficiera d'une assistance juridique en début de procès.

Les réserves à l'encontre des textes tiennent en partie à la ligne de crête que vous avez décidé de tenir, monsieur le rapporteur : protéger les personnes physiques et non les personnes morales. C'est pourtant l'association qui permettra au lanceur d'alerte d'être vraiment protégé, en lui donnant la possibilité de garder l'anonymat – même si celui-ci serait bien sûr levé dans le cadre d'une procédure judiciaire. Il faudrait sans doute aussi constituer un fonds – je pense que vous en convenez – pour compenser les pertes de revenus et indemniser les préjudices causés. Nous attendons donc des évolutions concernant les associations. Cela ne figure pas dans la directive, j'en conviens, mais il faudra y venir dans un texte ultérieur.

Je rappelle qu'il revient en principe à l'administration de contrôler la bonne application de la réglementation. Je pense notamment à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) qui fait un travail remarquable – c'était également le cas en matière d'appels d'offres mais, désormais, elle ne peut plus les contrôler faute d'effectifs et de moyens. Je pense encore aux contrôles fiscaux et douaniers. Le lanceur d'alerte n'a donc pas à se substituer à l'État et ne doit pas lui servir de prétexte pour se désengager de ses missions de contrôle, qui sont essentielles

Je terminerai en précisant que la culture déontologique doit être diffusée intelligemment. L'indépendance du déontologue vis-à-vis de l'employeur doit précisément lui permettre de soutenir les lanceurs d'alerte.

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