Intervention de Marie-George Buffet

Séance en hémicycle du mercredi 17 novembre 2021 à 15h00
Améliorer la protection des lanceurs d'alerte - rôle du défenseur des droits en matière d'alerte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-George Buffet :

Je tiens, pour commencer, à remercier M. le rapporteur pour son travail. L'action des lanceurs et des lanceuses d'alerte représente une nouvelle forme de contrôle des citoyens et des citoyennes au service des valeurs de la République – vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, les lanceurs et les lanceuses d'alerte constituent un nouveau pilier de notre République. Notre rôle est d'encourager et de protéger ces hommes et ces femmes qui dénoncent ceux qui, en toute connaissance de cause, commettent des actes contraires à nos lois et à nos principes.

Nos compatriotes expriment un besoin toujours plus grand de transparence, d'éthique et de probité de la part des institutions publiques, mais aussi des entités privées. Nous en faisons régulièrement le constat dans le cadre de notre activité de parlementaires : la confiance entre les responsables publics et les responsables privés s'est distendue. Or l'exercice d'une responsabilité et le respect des lois de la République ne s'accommodent pas d'à-peu-près.

Les lanceurs et les lanceuses d'alerte sont utiles parce qu'il existe des zones noires qui échappent aux règles censées s'imposer à toutes et à tous. L'impunité n'a de place nulle part, mais s'y opposer est un acte difficile. Disons-le clairement, on ne s'improvise pas lanceur d'alerte. Donner l'alerte, oser faire un signalement, n'est pas un acte anodin tant il peut avoir des conséquences irréversibles sur le quotidien du lanceur d'alerte et celui ses proches. C'est s'exposer aux représailles et aux procédures injustifiées, parfois aux attaques personnelles et au dénigrement, lesquels ont pour objectif de disqualifier les lanceurs d'alerte et de dissuader d'autres personnes de prendre la parole pour faire respecter le droit.

Les deux propositions de loi que nous examinons aujourd'hui ont pour ambition de mieux protéger les hommes et les femmes qui font le choix courageux de révéler des faits graves. Parce que les procédures intentées contre les lanceurs d'alerte sont parmi les premières armes utilisées pour les bâillonner, je salue les dispositions retenues par M. le rapporteur pour sanctionner leur usage et dissuader leurs auteurs d'y recourir. Garantir aux lanceurs d'alerte qu'ils ne seront pas victimes de représailles est l'une des avancées les plus essentielles de ces textes.

La reconnaissance des personnes morales – associations, ONG et syndicats – dans leur rôle de soutien des lanceurs d'alerte est également un grand pas, mais nous souhaitons qu'elles bénéficient des mêmes protections que les personnes physiques. Ces agents facilitateurs doivent pouvoir se substituer aux lanceurs et lanceuses d'alerte sans que ne s'exerce sur eux une quelconque forme de répression. La proposition de loi permet certes d'améliorer leur protection, mais certains lanceurs d'alerte aspirent à conserver leur anonymat. Il serait bon que nous leur accordions cette possibilité en protégeant mieux les associations qui prennent la responsabilité de relayer leurs signalements. Nous avons déposé plusieurs amendements en ce sens.

Ainsi, nous pensons qu'une alerte doit pouvoir être lancée par l'intermédiaire d'un journaliste, sans passer par le canal interne de signalement ou par une autorité externe. La proposition de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte acte la fin de la hiérarchisation des canaux de signalement, ce dont il faut se féliciter. L'obligation de saisir une instance de signalement interne ou le supérieur hiérarchique ne contribuait pas, en effet, à encourager le signalement, le risque de représailles étant trop fort. À condition d'être plus efficaces et véritablement indépendants, les canaux de signalement internes pourraient toutefois représenter une solution pour les lanceurs d'alerte. L'instauration d'un statut de « salarié protégé », dans le droit fil de dispositifs déjà prévus par le droit du travail, est dès lors nécessaire.

En outre, bien que la définition de lanceur d'alerte ait été précisée, il nous paraît important d'ajouter que, si le lanceur d'alerte agit, c'est qu'il a des motifs raisonnables de penser que les faits qu'il dénonce sont sérieux et méritent de faire l'objet d'un signalement. Il arrive parfois, en raison d'un manque d'information, qu'une alerte se révèle infondée. Adopter une définition plus large permettrait de protéger les hommes et les femmes qui, de bonne foi, se sont trompés et d'éviter qu'ils ne subissent des dommages du fait de leur erreur.

Enfin, renforcer le rôle du Défenseur des droits n'a de sens que si nous lui assurons les moyens nécessaires à son bon fonctionnement.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine tentera d'apporter quelques modifications à la proposition de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte en défendant des amendements issus des recommandations de la Maison des lanceurs d'alerte. Il salue cependant les avancées permises par ces deux textes et votera en leur faveur.

Quelques mots pour finir : pour que nos compatriotes soient réellement acteurs des choix qui concernent leur vie quotidienne et la nation tout entière, les lanceurs d'alerte nous appellent à refondre notre République !

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