À la suite du désaccord constaté mardi en commission mixte paritaire (CMP), nous engageons aujourd'hui la nouvelle lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Nos échanges et nos débats ont contribué il y a quelques semaines à enrichir la version initiale du texte, qui a été à nouveau travaillée par les sénateurs.
Ce dernier projet de loi de financement du quinquennat pour ce qui concerne la sécurité sociale permet de consolider notre système de santé et de soutenir nos soignants, après bientôt deux ans d'une épidémie qui a rappelé toute leur importance. C'est un PLFSS qui améliore l'accès aux soins par des mesures très concrètes, notamment la prise en charge par l'assurance maladie de séances chez le psychologue, la gratuité de la contraception pour les femmes jusqu'à 25 ans ou encore la simplification de l'accès à la complémentaire santé solidaire. C'est aussi un projet de loi qui permet des progrès en matière d'autonomie, d'accompagnement et de prise en charge de la dépendance, avec notamment la mise en place d'un tarif plancher et d'une rémunération à la qualité pour les soins à domicile.
Des évolutions consensuelles ont trouvé leur place dans la navette parlementaire. Je pense notamment à l'exonération de la part salariale de la surcotisation sur la prime de feu des sapeurs-pompiers, ce qui constitue un geste de reconnaissance envers ceux qui nous protègent. Je pense aussi aux améliorations du processus de recouvrement des cotisations des artistes-auteurs, proposées notamment par votre rapporteur général, telles que la délivrance de certificats de précompte par l'URSSAF ou encore la facilitation du remboursement des trop-perçus. Je pense à l'élargissement du périmètre d'intervention du Fonds de lutte contre les addictions à ces nouvelles addictions que sont les jeux, les paris sportifs et les écrans. Je pense aussi à l'allongement à 24 ans de l'âge auquel les enfants majeurs peuvent continuer à bénéficier du régime local d'assurance maladie d'Alsace-Moselle comme ayants droit de leurs parents, ce qui permettra d'assurer aux plus jeunes un meilleur accès aux soins. Je pense à la mise en place d'un capital-décès pour les familles des non-salariés agricoles, ce qui permettra de leur apporter un soutien financier lorsqu'elles sont confrontées au décès de l'un des leurs du fait d'une maladie, d'un accident de la vie ou d'un suicide.
Je souhaiterais revenir plus précisément sur la question de la trajectoire des finances sociales. Par rapport au texte que vous avez examiné il y a quelques semaines, cette trajectoire a été actualisée : le déficit du régime général de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) devrait s'établir à 33,5 milliards d'euros en 2021, à 20,4 milliards d'euros en 2022, et dépasser encore – malheureusement – 11 milliards d'euros en 2025.
Cette amélioration par rapport aux prévisions précédentes résulte de la révision de la prévision de croissance, désormais estimée à 6,25 % en 2021, soit un quart de point supplémentaire. Elle devrait être de 4 % en 2022 et cette amélioration valide la politique que nous menons. Je précise que si la croissance constatée était finalement supérieure à 6,25 %, comme le prévoient un certain nombre d'organismes comme le Fonds monétaire international (FMI), la Commission européenne ou la Banque de France, le surplus de recettes ainsi généré diminuera encore ce déficit.
Cette trajectoire intègre également un relèvement de 1,7 milliard d'euros pour 2021 de l'ONDAM, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, en raison à la fois de dépenses plus dynamiques que prévu, de la nécessité de couvrir les surcoûts des établissements de santé en lien avec le Covid, enfin de l'entrée en vigueur dès novembre 2021 des accords Laforcade pour les personnels des établissements et les services pour personnes handicapées, annoncée par le chef du Gouvernement le 8 novembre dernier. L'ONDAM pour 2022 a quant à lui été rehaussé de 500 millions d'euros, essentiellement pour prendre en compte les effets des dépenses supplémentaires constatés en 2021.
Des doutes et des inquiétudes quant à la dégradation des comptes sociaux se sont exprimés au cours des débats. Ces doutes sont légitimes : si la sécurité sociale a pu jouer ce rôle si important de protection des Français contre les risques de la vie, c'est bien grâce à l'amélioration des comptes intervenue avant la crise sanitaire et au sérieux dont ce gouvernement a su faire preuve. Sans les ambitions de retour à l'équilibre que nous nourrissions avant la crise sanitaire, la sécurité sociale n'aurait pas pu autant nous protéger à l'occasion de cette crise.
Pour sortir de la crise, nous devons éviter de refaire les erreurs du passé. Le Gouvernement assume parfaitement le fait que ce projet de loi ne contienne aucune mesure brutale de rétablissement des comptes : ce n'est pas notre choix. Contrairement à celui qui avait été fait après la crise de 2009-2010, notre engagement et notre priorité sont de favoriser l'emploi et la croissance. Je suis convaincu, vous le savez, que c'est d'abord grâce à celle-ci que nous rétablirons nos finances publiques et donc nos finances sociales.
Cette politique économique porte ses fruits, puisque nous avons pu relever d'un quart de point nos prévisions de croissance. Quant au taux de chômage, il est déjà revenu à son niveau d'avant-crise, et même en deçà : avant la crise, 8,1 % de la population active était au chômage ; ce pourcentage est désormais de 7,6 %. Nous sommes donc à quelques encablures de réussir ce qui semblait impossible : poursuivre la baisse du chômage après la traversée de la crise et viser le plein emploi.
La croissance suffira-t-elle à redresser les comptes sociaux et à garantir totalement le retour à l'équilibre ? La réponse est non, et c'est la raison pour laquelle le travail devra être poursuivi. Il n'est pas envisageable de reporter indéfiniment le retour à l'équilibre puisque, si nous ne remboursons pas nos dettes, ce sont évidemment les générations qui suivent, nos enfants, qui devront assumer le poids de nos déficits actuels, outre que nous obérons nos possibilités de faire face dans l'avenir à des crises d'une ampleur comparable à celle que nous avons vécue. Je souhaite donc insister sur la nécessité des réformes suivantes.
En premier lieu, nous devrons plus que jamais adopter une vision et un pilotage global des finances publiques, ainsi qu'une gouvernance modernisée de nos finances sociales. C'est l'ambition de la proposition de loi organique que vous avez adoptée le 19 juillet dernier à l'initiative de votre rapporteur général et sur laquelle les échanges avec le Sénat sont en cours.