Le Gouvernement et sa majorité persistent et signent. À l'issue des travaux de la commission, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale ne comporte malheureusement pas d'améliorations par rapport au texte initial. Nos collègues sénateurs ont pourtant apporté de nombreux enrichissements que le groupe Les Républicains soutient, mais les amendements déposés par la majorité visent à les supprimer, ce qui augure mal de la discussion à venir, d'autant que les questions fondamentales que nous avons posées restent sans réponse.
Lors de la première lecture, l'ordre du jour de notre assemblée avait relégué l'examen de ce PLFSS en fin de semaine ; cette fois, nous en débattons en tout début de semaine. Il n'est pas sérieux de nous imposer une telle accélération du calendrier et des délais de dépôt d'amendements irréalistes.
Compte tenu du peu de temps qui nous est imparti, il est bien difficile de trouver une ligne directrice dans ce catalogue de mesures éparses, qui contient au demeurant bon nombre de cavaliers sociaux. Cela ne suffit pas à faire une loi santé. À l'approche de l'élection présidentielle, vous ouvrez le carnet de chèques – en bois – pour tenter de rattraper ce que vous avez omis de faire pendant le quinquennat. Mais le calendrier se rétrécit et il est désormais trop tard. En commission, vous avez détricoté le texte du Sénat.
Certaines mesures sociales vont dans le bon sens, nous l'avions souligné en première lecture, mais l'ensemble du texte ne répond pas aux grands enjeux : garantir un accès aux soins de qualité pour tous, assurer la sérénité dans les hôpitaux ou encore préserver la médecine libérale. Ainsi, quelle réponse apportez-vous à la pénurie de main-d'œuvre et à la fermeture de lits dans des proportions plus importantes encore qu'avant la crise sanitaire ? En raison de l'extension de la cinquième vague de l'épidémie, les conditions d'accueil à l'hôpital risquent de devenir critiques.
La facture du Ségur de la santé n'a pas calmé le malaise des professionnels. Que répondez-vous aux colères des sages-femmes ou des infirmières anesthésistes, qui sont les oubliées de votre politique ? Que répondez-vous aux aides-soignants ou aux formateurs de la Croix-Rouge ? Vous ne ferez pas de médecine sans les médecins et sans les personnels paramédicaux.
Malgré un retour à l'excédent de la branche famille, vous ne relancez pas la politique familiale, à l'arrêt depuis quatre ans, alors que la crise sanitaire l'a rendue encore plus nécessaire.
Vous avez enterré la loi « grand âge et autonomie » : quelles sont donc les perspectives de la cinquième branche ? Vous avez même supprimé, en commission, les dispositions relatives à la convocation d'une conférence nationale des générations et de l'autonomie, pour vous contenter de la remise d'un simple rapport. Mais, mes chers collègues, les rapports n'ont jamais fait la loi !
Vous avez choisi de ne pas proposer de mesures de maîtrise des dépenses et vous poursuivez au contraire la politique de déficits de la sécurité sociale à moyen terme, déficits qui ne diminueraient plus et qui, de l'aveu même du ministre délégué chargé des comptes publics, se stabiliseraient autour de 15 milliards d'euros par an. Or il est essentiel de tracer une perspective d'équilibre : c'est un impératif de bonne gestion des finances sociales, que la Cour des comptes recommande d'ailleurs.
À la fin de l'année 2021, l'URSSAF, caisse nationale, devrait supporter environ 50 milliards d'euros de déficits cumulés des différentes branches. Le déficit des administrations de la sécurité sociale devrait s'élever à 34,4 milliards à la fin de l'année en cours. Dès à présent, il est certain que le plafond de 92 milliards d'autorisations de reprise de déficits par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) au titre des exercices 2020 à 2023 ne permettra pas de couvrir le déficit de 2023. À la lecture de l'annexe B, nous ne pouvons qu'être perplexes sur l'échéance d'extinction de la dette sociale qui doit intervenir avant le 31 décembre 2033. Aussi, nous vous posons la question suivante : jusqu'à quand envisagez-vous la dette sociale et dans quelle ampleur ?
Votre budget est très inquiétant, monsieur le ministre délégué. Vous mettez les déficits sous le tapis, ce qui n'est pas politiquement glorieux. Dans ce budget de l'esquive, vous refilez à vos successeurs et aux générations futures le mistigri de la dette qui, nous le craignons, deviendra explosif. C'est pourquoi, vous le comprendrez, le groupe Les Républicains ne votera pas le projet de loi.