Intervention de Martine Wonner

Séance en hémicycle du mardi 23 novembre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Wonner :

Nous sommes réunis aujourd'hui pour faire semblant de débattre d'un nouveau projet de loi de finances rectificative, le second concernant le PLF pour 2021. Si cet exercice est en principe habituel, avec un schéma de gestion en fin d'année, ce texte pose de nombreuses questions eu égard au nombre de paramètres qu'il rectifie dans le PLF d'origine.

Peut-on d'ailleurs parler encore de simple rectification ? Alors que le déficit augmente, que les dépenses publiques atteindront 55,7 % du PIB en 2022, que la dette représente 115,3 % du PIB cette année, le Gouvernement légifère encore et toujours dans l'urgence et la précipitation, sans une vision pérenne et sereine pour notre pays et les 67 millions de Français.

Ce projet de loi ne se contente pas de réajuster certaines mesures d'un budget voté en amont, dans des conditions laissant un minimum de place au dialogue nécessaire au travail parlementaire. Non, le Gouvernement légifère de nouveau en urgence, sans tenir compte du Parlement, organe de contrôle pourtant nécessaire, à qui il soumet, avec ce texte, de nouvelles mesures de dépenses massives. Pourquoi ce calendrier, pourquoi cette précipitation, sinon pour répondre aux effets d'annonce des discours louvoyants du Président de la République ? Le Haut Conseil des finances publiques avait pourtant donné l'alerte : « Le surcroît de recettes attendu n'est pas consacré au désendettement », il « est, au contraire, plus que compensé par un surcroît de dépenses. » La situation des finances publiques ne cesse donc de s'aggraver.

L'attitude du Gouvernement, sur ce sujet comme sur tous les autres, est, une fois de plus, inacceptable, tout d'abord parce qu'elle symbolise le mépris du Gouvernement pour le Parlement, ainsi que son incapacité à gouverner de manière démocratique, démontrant une nouvelle fois, à quelques mois des prochaines échéances électorales, qu'il est urgent de réformer nos institutions. De plus, ce texte introduit une dépense nouvelle de 3,8 milliards d'euros, qui pèseront durablement sur l'équilibre financier de notre pays, tout cela étant débattu en moins de deux semaines sur nos bancs, et n'étant entériné qu'avec le seul soutien d'une majorité aveuglée par sa loyauté. Ce texte vient également contredire l'engagement budgétaire pris il y a un an par le Gouvernement devant l'Assemblée. Il intervient de façon opportuniste, alors qu'en ce moment même est débattu le projet loi de finances pour 2022.

Que cherche ici à faire le Gouvernement ? En manquant de clarté, il consomme la rupture de confiance non seulement avec les parlementaires mais surtout, et définitivement, avec la population. Ce texte manipule les comptes publics comme il manipule la précarité des Français, de manière irresponsable, à mille lieues des réalités territoriales : sont-ils en prise avec la réalité, les membres du Gouvernement qui osent dire sur ces bancs que le pouvoir d'achat a augmenté, que ce que ressent une partie de la population, qui est pourtant retournée dans la rue, ne correspond pas à la réalité, et que le peuple français nage dans le bonheur ? La propagande bat son plein ! Mais dans quelle réalité le Gouvernement vit-il ? Celle des lobbies, et ce depuis maintenant près de cinq ans !

Avec une indemnité de 100 euros, l'exécutif va jusqu'à imaginer qu'il peut endormir les Français, dont la précarité a bel et bien été aggravée par les politiques menées au cours de ce quinquennat. Et comment cette nouvelle dépense est-elle financée ? Serait-ce encore le « quoi qu'il en coûte » ? Quoi qu'il en coûte pour qui, d'ailleurs ? Pour les Français, victimes des déserts médicaux et des hôpitaux publics devenus moribonds ? Pour tous les professionnels suspendus et précipités avec violence dans une mort sociale ? Pour les personnes mal logées ? Pour les petits commerçants et les travailleurs les plus précaires ? Pour toutes ces personnes, il en coûte, monsieur le ministre délégué ! Elles le paient au quotidien, elles le paient dans leur chair et elles le paieront au prix fort dans les années qui viennent.

Les Français ne s'achètent pas et ils vous le signifieront bientôt avec fermeté.

Vous leur avez dit qu'il n'y a pas d'argent magique pour améliorer le service public et leur quotidien, mais quand il s'agit de dépenser des milliards pour maintenir le système économique sous perfusion, toutes les dettes sont permises. Et il est évident que cette disparition de nos services publics se fera avant tout au détriment de nos populations les plus fragiles. Les mesures que vous nous présentez ne sont pas acceptables, aussi bien sur le fond que sur la forme. Elles contribuent pleinement au rejet des Français à votre égard : ils ne comprennent pas pourquoi les dépenses publiques sont au plus haut alors que, à l'inverse, leur situation est au plus bas. La posture électoraliste du Gouvernement se fera sentir très prochainement.

Pour toutes ces raisons, c'est avec fermeté que je voterai contre ce texte.

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