Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du mercredi 24 novembre 2021 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

La période préélectorale actuelle a sans doute des effets sur les choix budgétaires. Le groupe Libertés et territoires prend acte de la reprise économique et du regain heureux de la croissance à 6,25 %.

Nous regrettons toutefois que le surcroît de recettes qui en découle ne soit pas suffisamment utilisé pour assainir la situation des finances publiques.

Sans doute aurait-il été préférable de consacrer les 15 milliards d'euros de plus-values à la baisse du niveau d'endettement qui dépasse, comme tout le monde le sait, les 115 % du PIB et s'approche dangereusement des 3 000 milliards.

En ce sens, je ne peux que rappeler les constats du président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) qui regrette ce choix budgétaire tant dans ce PLFR que dans le PLF pour 2022.

Notre groupe est d'autant plus surpris que, dans le projet de loi de finances pour 2022, le Gouvernement a cantonné la dette liée au covid à 165 milliards d'euros pour l'État et qu'il s'était engagé à la rembourser par « les fruits de la croissance, dont résulteront les surcroîts de recettes, et non par des hausses d'impôts ». Sans doute aurait-il été préférable d'appliquer cette stratégie.

En dépit de nos réserves, je tiens à dire qu'il y a également des dispositions positives dans ce budget rectificatif de fin d'année.

Tout d'abord, je salue la justesse des redéploiements effectués dans le cadre du plan de relance.

Le comité de suivi présidé par Benoît Cœuré a montré son utilité en identifiant en cours de route les actions les moins utilisées, faute d'avoir trouvé leur public – je pense notamment à l'activité partielle de longue durée – et celles qui nécessitent au contraire un accompagnement encore plus poussé de l'État comme le dispositif « 1 jeune, 1 solution ».

Nous soulignons également les redéploiements effectués au sein de France relance pour soutenir la reprise verte, même si les investissements dans la transition écologique peuvent être jugés insuffisants.

Nous savons qu'il faut accélérer la rénovation énergétique des logements, pérenniser les dispositifs, cibler les rénovations et confier davantage ces politiques aux collectivités. Nous maintenons en effet les réserves émises depuis le lancement de ce plan, à savoir son manque de territorialisation et le faible pouvoir de décision des élus locaux, qui auraient pu être de véritables partenaires stratégiques. C'est particulièrement le cas en Corse, où il serait logique, compte tenu du statut de l'île, que les élus soient associés étroitement aux décisions qui la touchent directement.

J'en viens au cœur de ce texte avec l'indemnité inflation de 100 euros qui doit être versée à 38 millions de Français. Comme pour le bouclier tarifaire, notre groupe déplore le choix d'une logique de chèque plutôt que d'une réforme fiscale profonde.

Bien entendu, il est nécessaire d'accompagner les citoyens face à la hausse des carburants, mais le dispositif proposé paraît mal calibré et potentiellement injuste, tant par ses effets d'aubaine que de seuil. Comment expliquer à nos concitoyens qu'une mère célibataire avec trois enfants qui gagne 2 050 euros par mois ne touchera pas cette aide, alors qu'un employé gagnant moins de 2 000 euros qui est marié à un cadre qui en gagne 10 000 pourra la percevoir ? La solution proposée par nos collègues sénateurs, sans être parfaite, permettait de concentrer l'aide sur les plus démunis.

En outre, les modalités de versement de cette indemnité posent de sérieuses difficultés. Le Gouvernement impose aux employeurs et aux collectivités de la verser dès le mois prochain en dépit des difficultés de trésorerie que nous connaissons. Cependant, alors que l'État exige une rapidité excessive des entreprises, il a décidé de décaler à 2022 ses propres versements.

Ensuite, les dispositions du texte sont très limitées et renvoient à un décret la fixation de principes importants, tels que le plafond maximal de revenu et le calendrier de versement. Nous en apprenons plus à travers le dossier de presse que dans l'évaluation préalable ! Cela contribue, une fois de plus, à un dessaisissement du Parlement.

Du reste, je relève que cette indemnité est dévoyée de son objectif initial, plus aucun lien ne liant son versement à la hausse des prix du carburant.

Enfin, cette aide accentue les fractures sociales. Son calibrage défaillant sur les revenus du travail individuel est à l'opposé de la logique de solidarité qui se fonde sur la totalité des revenus du foyer fiscal.

Comme vous l'aurez compris, le groupe Liberté et territoires émet de sérieuses réserves à l'égard de ce budget rectificatif.

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