Intervention de Antoine Herth

Séance en hémicycle du jeudi 25 novembre 2021 à 15h00
Coopération hospitalière transfrontalière — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAntoine Herth :

Cette proposition de résolution que j'ai l'honneur de soutenir avec Olivier Becht, au nom du groupe Agir ensemble, illustre parfaitement nos préoccupations collectives. Nous n'avons eu de cesse de le rappeler : la santé, et en particulier le système hospitalier, sont pour notre société des éléments vitaux qu'il faut soutenir, défendre et renforcer. De même, l'idée européenne et sa concrétisation dans la coopération transfrontalière sont des idéaux profondément ancrés dans les valeurs défendues par notre groupe.

L'esprit de cette proposition de résolution repose d'abord sur le retour d'expérience de la crise sanitaire que nous traversons. Notre système hospitalier a tenu et tient encore le choc grâce à la mobilisation exceptionnelle de tous les personnels de santé, mais aussi à la solidarité européenne : celle-ci nous a permis, au plus fort des tensions, de transférer des patients vers les hôpitaux de nos voisins européens ou encore de disposer de vaccins de qualité pour tous. Cependant, dans la période la plus dramatique, au début de l'année 2020, ce sont les sentiments de confusion et d'improvisation qui ont dominé. Les exemples de solidarité entre hôpitaux frontaliers doivent en grande partie leur réussite à la persévérance des personnels et des élus qui ont parfois fait fi, dans l'urgence, des règles administratives et des barrières linguistiques.

Pourtant, l'idée de la coopération hospitalière n'est pas nouvelle : depuis plus de vingt ans, des jalons ont été posés tant au niveau européen qu'au niveau national. L'article 168 du traité de Lisbonne définit ainsi les compétences en matière de santé et encourage la coopération transfrontalière. Quant à la directive 2011/24/UE, elle précise les droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers. Sur le plan national, la coopération sanitaire transfrontalière est aussi une réalité. Elle s'appuie sur les schémas régionaux d'organisation des soins (SROS) de 2011, qui s'inscrivent dans le prolongement des accords-cadres bilatéraux que la France a conclus avec ses voisins.

En me rendant à Kehl, en Allemagne, pour échanger avec les équipes du projet TRISAN – centre de compétences trinational pour vos projets de santé –, j'ai pu mesurer les avancées concrètes, mais aussi le chemin qui reste à parcourir. La coopération sanitaire entre la France et la Belgique – plus précisément entre les Hauts-de-France et la Wallonie – est citée comme l'exemple le plus abouti de ce partenariat préconisé par l'Europe. La transparence dans la prise en charge des patients y est complète, y compris s'agissant des remboursements : les cartes Vitale françaises sont en effet acceptées en Belgique, et vice-versa. Le partenariat interhospitalier en cardiologie entre les hôpitaux de Forbach, dans le nord de la Lorraine, et de Völklingen est également salué ; mon collègue Christophe Arend m'a indiqué ce matin que cette coopération pourrait être prolongée et resserrée. Citons également la coopération entre les hôpitaux de Mulhouse et Colmar et celui de Bad Krozingen sur les pathologies liées à l'arythmie cardiaque. Enfin, la maternité de Wissembourg, dans le nord de l'Alsace, accueille les futures mamans de la région de Landau.

Mais beaucoup reste à faire, tant avec nos voisins allemands qu'avec nos voisins suisses, par exemple pour clarifier le statut sanitaire de l'EuroAirport de Bâle-Mulhouse. Il n'est pas interdit de travailler également en direction de nos voisins du sud ; soulignons à cet égard l'expérience originale qui est en cours avec l'hôpital de Cerdagne, qui accueille les patients, français ou catalans, résidant des deux côtés de la frontière. S'il reste des obstacles administratifs à surmonter, je me réjouis que le projet de loi 3DS, que nous examinerons avant Noël, affiche à l'article 57 la volonté de renforcer la coopération sanitaire applicable dans les régions frontalières dans le cadre des SROS. Cette avancée sera également de mise dans les collectivités ultramarines : bravo !

Là où il est effectif, ce travail en commun au profit de populations qui ne sont le plus souvent séparées que par un trait sur la carte repose d'abord sur la bonne volonté des hommes et des femmes à qui l'on donne l'occasion de s'asseoir autour d'une même table pour conjuguer leurs talents. Ne négligeons cependant pas les obstacles, qu'ils soient linguistiques ou qu'ils aient trait aux différences de culture ou de pratiques médicales et administratives entre des communautés soignantes et hospitalières formées dans des cadres distincts. Alors que la routine invite à l'immobilisme, la genèse d'un projet transfrontalier est toujours le fruit d'un dépassement et d'un engagement humain hors norme. Mais, nous le croyons, la cause est juste et mérite qu'on s'y attelle.

Dans cette optique, il nous faut définir des objectifs fédérateurs. Par exemple, une coopération sur les maladies rares, qui ne sont prises en charge que par quelques établissements hospitaliers – comme à Strasbourg – pourrait bénéficier à un bassin de vie dépassant les frontières nationales.

Voici donc l'objectif de cette proposition de résolution : consolider les coopérations qui sont déjà effectives, ouvrir de nouveaux chantiers et encourager le Gouvernement à mobiliser l'ensemble des leviers à sa disposition. Je suis persuadé qu'en vertu de ces efforts, nous serons mieux préparés pour affronter ensemble les crises sanitaires du futur. En adoptant cette résolution, mes chers collègues, l'Assemblée nationale apportera son soutien solennel à une belle mission et à celles et ceux qui mettront leur talent à son service.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.