Intervention de Pierre Dharréville

Séance en hémicycle du mercredi 8 décembre 2021 à 21h30
Différenciation décentralisation déconcentration et simplification de l'action publique locale — Article 56 (appelé par priorité)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

La métropole d'Aix-Marseille-Provence est en échec – pour ne pas dire qu'elle est un échec. C'est un mastodonte, qui regroupe 92 communes et s'étend sur les deux tiers du département des Bouches-du-Rhône, qui en compte 119. Je rappelle qu'elle a été imposée aux élus et aux habitants, dans une prétendue logique de puissance et de centralisation.

Notre territoire est un territoire mosaïque, ce qui, dans ma bouche, est une richesse, et il n'était pourtant pas dépourvu de coopérations puisqu'il y avait six établissements de coopération intercommunale, dont certains très anciens, portant des projets originaux adaptés aux différents enjeux, aux cultures et aux bassins de vie : le Pays d'Aubagne, le Pays de Martigues, le Pays d'Aix, le Pays d'Istres-Fos-Miramas et le Pays de Salon. Mais non, il fallait tout centraliser à Marseille. Cela devait être pour son bénéfice et cela se retourne contre elle. On nous a vendu du rêve et tout s'est passé, hélas, comme nous l'avions pressenti.

Il fallait donc faire quelque chose, madame la ministre. Vous l'avez compris, et nous voici – même si des discussions ont été menées, y compris par vous-même, dans les Bouches-du-Rhône – à discuter ici sans filet, le Sénat ayant déjà examiné, mais sans toutes les dispositions que vous allez nous proposer, un texte sur lequel l'urgence a de surcroît été déclarée… Nous avons en réalité bien peu de marge pour affiner les choses. En outre, votre proposition ne fait pas l'unanimité, contrairement à ce que j'ai entendu dans certaines interventions précédentes : les maires vous l'ont dit lorsque vous êtes venue, ainsi que cinq des six présidents de conseil de territoire. Au final, cette proposition revient à aller au bout de la logique d'intégration forcée, de centralisation des pouvoirs, faisant de la métropole une pyramide.

À mes yeux, la métropole doit avoir la charge des grands schémas directeurs, point qui pourrait faire l'objet d'un large accord, l'environnement, le développement économique, l'aménagement du territoire… Il faut par ailleurs redonner des compétences au bloc communal – ce que vous faites en partie, prenant acte d'une situation qui résulte de décisions des élus métropolitains ; mais vous le faites sans aller au bout, par exemple pour la voirie, mais aussi pour d'autres sujets, qui mériteraient de plus amples discussions. Et vous choisissez au bout du compte de supprimer un élément qui avait permis de rendre un peu acceptable la réforme et de ne pas courir complètement à la catastrophe : les conseils de territoire. C'est pour moi un choix incompréhensible, car vous savez que la coopération imposée à quatre-vingt-douze communes dans notre territoire ne peut être une fin en soi et que des coopérations entre les différentes communes – dans notre département et au-delà – sont également nécessaires.

Les territoires sont des lieux d'élaboration et de construction d'une politique commune. Nous courons là le risque d'affaiblir des coopérations existantes. Vous nous indiquez vouloir déconcentrer un certain nombre de services tout en recentralisant par ailleurs, puisque vous supprimez l'échelon du conseil de territoire, ce qui risque de revenir, au bout du compte, à renforcer le pouvoir administratif au détriment de la vie démocratique et de sa vitalité. Nous ne voulons pas être administrés : nous voulons pouvoir faire vivre la démocratie locale pleinement.

Reste enfin la question des moyens financiers. Elle n'est pas réglée, ce qui laisse planer un doute sur les décisions que notre assemblée va prendre aujourd'hui, et elle inquiète beaucoup, que l'on pense à la vieille idée consistant à puiser toujours un peu plus loin dans les ressources des communes ou à la décision de faire présider la CLECT par le président de la chambre régionale des comptes, symbole assez éloquent d'une forme de reprise en main administrative de questions qui sont pourtant d'ordre politique.

Il ne s'agit donc pas pour nous d'un compromis, mais plutôt d'une déception. Vous pourriez mieux écouter encore les élus de notre territoire. La perspective n'est pas claire : où allons-nous ? Quel est le plan ? Certains parlent d'en finir avec le statut d'établissement public de coopération intercommunale de la métropole pour en faire une collectivité surplombante par rapport aux communes. À mes yeux, ce n'est pas la bonne direction. Il faut réparer avant toute chose. Je pense que c'est possible, et je ferai au cours de ce débat des propositions pour rendre l'amendement que vous avez mis sur la table plus acceptable et plus opérant.

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