C'est probablement l'une des dernières interventions – voire la dernière – de cette législature que je ferai à cette tribune sur un projet de loi de finances. Permettez-moi donc de revenir sur ces cinq années de débat budgétaire à vos côtés – je dis « débat » mais je pourrais dire « soliloque » car ce fut souvent le cas.
Je reviendrai donc sur ces cinq ans pour expliquer cette énième motion de rejet. En effet, comme toutes les précédentes que nous avons déposées, elle exprime une opposition, non pas de principe mais sur le fond, une opposition politique, au sens noble du terme, sur le mode de gestion de la société.
La politique budgétaire est à cet égard la politique des politiques, celle qui détermine toutes les autres, celle qui a des conséquences directes sur la vie des gens, celle, surtout, qui traduit votre vision de la société : une société de la compétition de tous contre tous, qui fait primer le bon fonctionnement du système capitaliste financiarisé, quoi qu'il produise, quoi qu'il détruise, et qui mesure sa réussite au regard de la croissance du PIB plutôt que de celle du bien-être humain, en faisant croire que la seconde dépend de la première.
Voilà des discussions politiques de fond qui n'ont jamais été entamées. Pire : elles ont été balayées d'un revers de main, comme en témoigne une réflexion de l'ancien rapporteur général, qui m'a dit un jour, à propos d'un amendement portant sur la baisse de la TVA sur l'eau, qu'il connaissait par cœur nos « amendements politiques » – un lapsus, probablement, qui, cependant, en dit long sur votre conception de la politique, réduite à de la gestion comptable, contrainte par le cadre européen.
Nous ne sommes pas les greffiers de Bercy.