Pourtant, c'est à ce rôle que vous nous réduisez, enfermant ainsi nos débats dans une vision comptable.
Regardons le bilan de cette comptabilité. On observe tout d'abord un affaiblissement de l'État, lequel devrait pourtant être, plus que jamais, le garant de la cohésion sociale de la nation, aujourd'hui mise à mal.
On note aussi une fragilisation sans précédent des recettes fiscales de l'État, sous prétexte de compétitivité ou de regain de pouvoir d'achat : suppression de l'ISF, l'impôt de solidarité sur la fortune, et instauration de la flat tax, pour un coût de 5 milliards d'euros par an ; baisse des impôts de production, pour un coût de 10 milliards par an ; baisse de la taxe d'habitation, pour un coût de 17,6 milliards par an.
Autre effet de votre politique : un relâchement du consentement à l'impôt, du fait du sentiment croissant d'iniquité face à la fraude fiscale. D'ailleurs, nombreux ont été les scandales financiers de ce quinquennat, des Panama papers aux récents Pandora papers. M. Le Maire a eu beau plastronner sur les plateaux télé en annonçant qu'il serait « intraitable avec ceux qui ont triché avec fisc français », ce sont près de 10 000 équivalents temps plein qui ont été sacrifiés sur l'autel de l'austérité à Bercy. Un verrou de Bercy aura ainsi été desserré d'un seul tour, en raison des complaisances du Gouvernement.
Autre conséquence de cette vision comptable : des services publics d'État ou des collectivités territoriales malmenés, alors qu'ils sont le seul bien de ceux qui n'ont rien. Ainsi, nos collectivités, qui ont pourtant démontré leur rôle majeur dans la vie de notre pays pendant la crise sanitaire, ont été remerciées de leurs bons services par ce qui se présente comme une baisse de moyens au vu des nouvelles missions qui leur incombent toujours un peu plus fortement.
Ainsi, nos hôpitaux, – faut-il encore en parler ? – sont toujours victimes de compressions budgétaires insensées, de regroupements ubuesques, voire de fermetures de lits, en pleine pandémie.
Ainsi, notre enseignement supérieur et notre recherche sont précarisés par votre management libéral et vos calculs mesquins, ainsi que le signale un récent rapport du Conseil d'analyse économique, qui dresse le constat implacable d'un sous-investissement chronique.
Ainsi, notre institution scolaire – un sujet qui m'est cher –, ne cesse d'être détricotée maille après maille, du lycée à la carte à l'autorité fonctionnelle des directeurs, et ce alors que les enseignants sont toujours parmi les moins bien payés de l'OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques –, que l'on peine à recruter des AESH, les accompagnants d'élèves en situation de handicap, en raison de la faible attractivité de leur métier, et que le solde de recrutement est nul.
En revanche, que de largesses, de clins d'œil, de mots doux susurrés aux prédateurs du CAC40 et autres grandes entreprises ! Pour la seule baisse des impôts de production, on constate un gain moyen de 940 euros pour les TPE, les très petites entreprises, contre 9,1 millions pour les grandes entreprises.
Et j'ose à peine mentionner la kyrielle de niches fiscales que votre majorité n'aura pas eu le courage d'abroger. Près de 40 milliards d'euros par an s'évaporent à cause de la seule niche Copé – régime mère-fille et intégration fiscale –, tandis que le coût annuel du crédit d'impôt recherche s'élève à 6 milliards et celui de l'ex-CICE, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, à 20 milliards, des pertes qui fragilisent notre protection sociale.
Pourtant ces mêmes entreprises du CAC40 ont détruit 60 000 emplois, dont la moitié en France.
Je le sais, la valse de chiffres aussi astronomiques est parfois difficile à appréhender pour le simple citoyen. J'ajouterai cependant que, à titre de comparaison, le recrutement de 100 000 soignants et soignantes que nous proposons représente environ 6 milliards d'euros, et ce en intégrant le rattrapage du point d'indice.
Votre majorité s'époumone pour mettre en exergue des résultats censément encourageants, notamment en matière de pouvoir d'achat. Mais qu'en est-il vraiment ? Eh bien, la réalité, c'est que M. Macron aura bien été le président du pouvoir d'achat… mais de celui des plus nantis ! Point n'est besoin de lire L'Humanité pour l'affirmer,…