Ce projet de loi de finances est d'abord un budget de précampagne présidentielle, qui entérine les nombreuses promesses de fin de mandat du Président de la République et de son gouvernement. Il permet au pouvoir en place de sortir le carnet de chèques pour éteindre les incendies que suscitent les légitimes inquiétudes des Français, notamment sur l'enjeu majeur que constitue l'évolution d'un pouvoir d'achat fortement touché par l'inflation.
En première lecture, lors de la discussion générale, il n'y a pas si longtemps, ma collègue Christine Pires Beaune dénonçait les 149 amendements alors déposés par le Gouvernement : c'était déjà un record. Vous n'avez pas trouvé d'autre réponse que d'en déposer cette fois 220 ! Elle dénonçait votre propension à mettre sur la table de nouvelles dépenses inconsidérées au dernier moment, comme votre amendement historique à 34 milliards d'euros. Hier, vous vous êtes contentés de déposer un nouvel amendement à l'article 42 octies, qui pourrait coûter un minimum de 8 milliards supplémentaires. Je dis « pourrait », parce que cet amendement n'est ni budgété ni évalué : rien ne permet d'éclairer le Parlement, comme c'est malheureusement trop souvent le cas.
Encore s'agit-il d'une nouvelle dépense qui ne prend pas en compte ce que la ponction cachée va coûter à EDF en raison de l'extension de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) et qui sera in fine payée par les clients restés attachés au service public de l'énergie. Heureusement que l'ouverture à la concurrence devait permettre de faire baisser les prix !
Ce n'est finalement qu'une mesure supplémentaire qui fait, une fois de plus, payer les petits. Pendant ce temps, les actionnaires de Total, entreprise qui devrait dégager cette année autour de 14 milliards de bénéfices nets, vont pouvoir accumuler des gains records. Nous vous avons proposé de les faire participer ; vous avez refusé.
Au-delà de ces derniers développements, que dire qui n'a pas déjà été dit des dizaines de fois au cours de ce trop long quinquennat ? Ce budget est un budget pour les riches, qui repose encore et toujours sur l'idée que les « premiers de cordée » vont faire ruisseler l'argent et que la croissance viendra. Oui, la croissance repart, mais vous vous en félicitez en escamotant le fait qu'il s'agit d'un rebond mécanique : en réalité, entre 2019 et aujourd'hui, elle reste trois fois moindre que celle du reste du monde. Résultat, les gains de pouvoir d'achat ayant profité au haut du spectre, une grande partie de la population reste précarisée. Elle est acculée au pied du mur quand l'inflation revient. Il vous faut alors sortir la lance à milliards pour éviter un épisode comme celui des gilets jaunes, pour éviter surtout un grand mouvement social à la veille des élections.
Combien de temps ce schéma tiendra-t-il ? Nul ne le sait. Quoi qu'il en soit, nous continuerons à nous opposer à cette impasse que nous jugeons trop injuste socialement.