Intervention de Laetitia Avia

Séance en hémicycle du jeudi 18 janvier 2018 à 15h00
Entreprise nouvelle et nouvelles gouvernances — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaetitia Avia :

S'agissant de la méthode, ce texte comporte des dispositions qui viendraient suppléer ou remettre en cause des mécanismes mis en oeuvre très récemment, que vous avez pour certains vous-même votés lors de la précédente mandature, mais qui n'ont pas encore pu produire leurs effets ou qui n'ont pas encore été évalués.

Surtout, et cela a été rappelé par mon collègue M. Balanant, de nombreuses dispositions de cette proposition révèlent la nécessité de poursuivre nos travaux pour en préciser le champ comme la teneur. Sur onze articles, cinq sont à mi-chemin entre la demande de rapport d'information et la proposition de mesures concrètes. Nous avons relevé cette difficulté en commission.

Force est de constater qu'en commission, aucun des groupes parlementaires n'a été en mesure d'alimenter le texte sur les bases fournies. En effet, nous avons étudié d'une part les amendements de suppression de notre collègue du groupe Les Républicains, et d'autre part les quelques amendements de M. le rapporteur visat à préciser, affiner son texte initial.

Un certain consensus s'est dégagé quant à la nécessité de poursuivre le travail de rédaction de cette proposition de loi, dans un esprit co-constructif, bien évidemment.

Vous me direz que c'est le travail de la majorité, mais en la matière, notre calendrier était connu et nous sommes déjà à l'oeuvre. Vous me direz encore que, s'il n'y a pas d'amendement, c'est parce que ce texte serait parfait. Et nous serons en désaccord sur ce point.

Si la révolution de notre modèle d'entreprise est bel et bien en marche, je crois, à la lecture de ce texte, que beaucoup de chemin reste à parcourir.

Si nous reprenons le fond du texte, sur le point central qu'est la définition de la société, nous devons proposer une rédaction qui permette de mieux conformer notre droit au champ des responsabilités auxquelles les entreprises peuvent ou doivent être exposées.

Mais votre proposition de loi semble confondre ce qui tient des conditions de constitution d'une société, de sa validité, avec ce qui relève de la vie de la société et de sa gestion quotidienne.

Surtout, elle vise la notion d'entreprise que nous n'avons toujours pas définie en droit, mais qui figure sur la feuille de route de la mission interministérielle lancée le 5 janvier dernier.

Nous devons engager une réflexion sur le rôle de l'entreprise et l'articulation entre les trois entités que j'évoquais tout à l'heure : actionnaires, dirigeants et salariés, qui concourent ensemble à la réussite de l'entreprise. Finalement, le vrai sujet est celui de l'articulation entre la dynamique d'entreprise et son utilité sociale et environnementale.

Vous évoquiez la proposition de Stanislas Guerini, qui appelait à créer un statut de société à mission. La proposition envisagée va en ce sens et nous attendons surtout les conclusions de la mission interministérielle sur ce sujet.

S'agissant du renforcement de la présence des salariés au sein des conseils d'administration, doit-on souligner que vous avez vous-même voté la loi Rebsamen et donc soutenu les seuils actuellement applicables ? Doit-on souligner que cette loi est entrée en vigueur le 1er janvier 2017, il y a tout juste un an, et qu'il n'a pas encore été procédé à son évaluation ? Doit-on souligner que les organisations syndicales ne demandent pas à ce que 50 % des conseils d'administration soient constitués de salariés ?

Le rôle du législateur n'est pas de gêner la bonne marche de l'entreprise par l'imposition de nouvelles règles de gouvernance tous les ans. Le conseil d'administration est un organe qui définit les orientations stratégiques de l'entreprise. En cela, il est un organe du temps long dont il faut considérer les évolutions avec méthode pour assurer leur efficacité.

S'agissant du troisième élément du texte, l'extension du champ de la participation obligatoire comme élément de rémunération des salariés dans des sociétés de vingt personnes, une fois n'est pas coutume, je dois dire que cette proposition de loi manque peut-être un peu d'ambition puisque M. le ministre soumet actuellement au vote, via la consultation publique, la possibilité de « Faire de l'intéressement et de la participation une réalité pour tous les salariés dans une logique de partage de la valeur ».

Gouvernement, majorité et acteurs du monde de l'entreprise s'accordent sur un point : il faut davantage intéresser les salariés au sort de l'entreprise. Et j'emploie ici le mot « intéresser » tant dans sa définition juridique que dans son acceptation dans le langage commun.

« Les salariés préfèrent recevoir le juste produit de leur travail qu'une cogestion » : je retiens ces propos d'une des auditions que vous avez menées, monsieur le rapporteur, et je ne peux qu'y adhérer.

Pour cela, il convient de faire bénéficier le plus grand nombre de salariés de mécanismes de partage de la valeur, sous forme de participation, d'intéressement, de modification du forfait social ou de tout autre mécanisme d'épargne salariale.

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