Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du mercredi 15 décembre 2021 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative à la présidence française du conseil de l'union européenne suivie d'un débat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Il ne faut pas raconter d'histoire à nos concitoyens. L'erreur que nous, Français, commettons souvent est de considérer l'Europe comme une France en plus grand. Or le fonctionnement de l'Europe ignore la volonté centralisée et privilégie en permanence la négociation.

Au moins pourrez-vous compter sur un alignement de planètes favorable, avec la nouvelle coalition allemande du chancelier Olaf Scholz.

Les chantiers que vous avez présentés, monsieur le Premier ministre, sont nombreux – nous en soutenons certains – et les objectifs que vous vous assignez sont ambitieux. Toutefois, c'est la loi du genre, les résultats risquent d'apporter leur lot de déceptions.

En matière de défense européenne, nous mesurons la montée des foyers de tensions, et ce jusqu'à nos frontières. La « boussole stratégique », initiative portée notamment par Josep Borrell, pourrait être présentée en mars prochain. Sera-t-il possible de dépasser enfin les divergences qui ont toujours empêché l'émergence d'une Europe de la défense ? Grande question !

Mon collègue Sébastien Nadot abordera – excusez du peu – la réforme de Schengen, la question des frontières, des migrations et le champ des valeurs. Pour ma part, je m'attacherai à la question du réarmement industriel de l'Europe.

La crise sanitaire a mis en lumière notre affaiblissement dans de nombreux domaines stratégiques. Trop souvent, notre continent a été le naïf de la mondialisation. La souveraineté européenne est invoquée. Il est urgent que l'Union crée des outils de protection industriels et commerciaux.

J'évoquerai plusieurs chantiers trop longtemps repoussés : l'harmonisation fiscale, la réforme des règles de concurrence, les alliances industrielles, ainsi que la régulation des GAFA.

Hier, le Parlement européen a adopté le Digital Services Act. Compte tenu des révélations de la lanceuse d'alerte Frances Haugen, une telle réforme est urgente. C'est un enjeu démocratique de premier plan. Le Digital Markets Act contre les abus de positions dominantes des grandes plateformes est tout aussi crucial.

Autre chantier d'envergure : la gouvernance de la zone euro. Les critères budgétaires actuels rendent indispensables une réforme rapide. Le Président de République a proposé de « repenser » ce cadre, sans plus de détail. Ma question est donc simple : avec quelle méthode, selon quelle direction, avec quels partenaires ?

Comment évoquer les grandes priorités sans aborder la transition écologique ? Notre groupe s'interroge sur le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières. Les propositions de la Commission se concentrent sur certaines importations comme l'acier, l'aluminium ou l'engrais. Je crains que cette ambition déjà réduite ne soit encore rognée. Comment la présidence française pourrait-elle faire en sorte d'approfondir les efforts nécessaires ?

Si j'avais disposé de davantage de temps, j'aurais pu également parler des politiques de cohésion, de l'influence du français et des stratégies pour la Méditerranée. Je finirai en disant que rapprocher les peuples, c'est aussi rapprocher les jeunesses. À l'heure où les jeunes Européens, particulièrement affectés par les répercussions de la pandémie, subissent un taux de chômage qui culmine à 17 %, ayons à l'esprit les mots de Jacques Delors : « Comment fera-t-on l'Europe, si les jeunes ne voient pas en elle un projet collectif et une représentation de leur propre avenir ? » Voilà ce qui devrait être notre boussole.

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