Intervention de Hervé Saulignac

Séance en hémicycle du mardi 4 janvier 2022 à 15h00
Différenciation décentralisation déconcentration et simplification de l'action publique locale — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Saulignac :

Le « nouvel acte de notre République » n'aura pas lieu. Le Président de la République avait appelé de ses vœux « une nouvelle démocratie, une nouvelle organisation et une nouvelle administration ». Voilà ce qui s'appelle un vœu pieux. Il faudra se contenter d'une loi « 3DS » qui balaie des sujets pour le moins hétéroclites. On peut admettre, sans trop de sévérité, qu'elle ne restera pas dans les annales. On peut le regretter, eu égard à la morosité des élus locaux, qui attendaient beaucoup, à l'état de notre démocratie, qui mérite également beaucoup, et à la défiance des citoyens envers leurs représentants, qui s'installe durablement.

L'heure est au renforcement d'un pouvoir central, toujours aussi peu enclin à partager ses prérogatives. Les corps intermédiaires passent au second plan, tout comme l'implication des citoyens dans la vie publique. Nous avons pourtant dit à plusieurs reprises, pendant le débat, notre foi en la démocratie locale et en ses représentants. Cette démocratie de proximité a besoin, pour se régénérer, de plus de décentralisation, de différenciation et de simplification. Il est dommage que vous n'ayez tout simplement pas traité le sujet de ce projet de loi.

Il convient néanmoins de reconnaître que ce texte comporte des éléments positifs ; le rejeter au seul motif qu'il manque d'ambition nous paraît assez peu justifié. Au chapitre des regrets, nous répétons que la simplification supposait de ne pas impliquer les régions dans le domaine routier, même à titre expérimental. Seuls les départements sont vraiment légitimes pour reprendre les 10 000 kilomètres de routes nationales dont l'État se déleste. Nous sommes cependant satisfaits d'avoir fait adopter un amendement qui prévoit une concertation des collectivités sous l'égide des préfets.

Nous regrettons les tergiversations au sujet des gestionnaires de collèges et de lycées. Le Gouvernement a souhaité supprimer le caractère expérimental initialement prévu pour transférer directement l'autorité fonctionnelle, ce qui ne se fera pas sans créer plus de problèmes que cela n'en résoudra.

Au chapitre des avancées, on retiendra l'adoption de deux de nos amendements, qui facilitent la sortie de l'indivision successorale en outre-mer. On saluera aussi le partage de données entre administrations au bénéfice des usagers. On peut noter avec satisfaction les dispositions qui renforcent le chef de filat des départements, en particulier en matière de précarité énergétique. On se félicite également des dispositions qui confortent le CEREMA dans ses missions et dans sa gouvernance.

S'agissant de la santé, permettez-nous de voir un verre à moitié plein, et par conséquent à moitié vide. Les ARS seront désormais contraintes de donner des avis motivés sur le schéma régional d'organisation des soins (SROS) et le projet régional de santé (PRS) : elles devront rendre des comptes plus qu'elles ne le font aujourd'hui. De même, la signature des contrats locaux de santé visera en priorité les déserts médicaux, conformément à un amendement que nous avions déposé. Il n'en reste pas moins que la voix des membres des conseils d'administration qui n'appartiennent pas au collège de l'État restera toujours aussi peu représentée.

Toujours dans le champ de la santé, s'il est louable de vouloir mobiliser les financements des collectivités, nous redisons avec force qu'il revient en premier lieu à l'État d'investir dans les établissements de santé : en aucun cas, la participation d'une collectivité ne doit conditionner la mise en œuvre d'un projet de cette nature.

Nous avons le même sentiment d'inachevé sur la question de la recentralisation du RSA, pour l'heure une expérimentation, dont les mécanismes financiers complexes entraînent des conséquences très diverses sur les finances des départements et sur les ressources issues du Fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO).

Reconnaissons enfin que l'exécutif a bien souvent été confronté à une forme de chantage à la commission mixte paritaire (CMP). Nous saluons la résistance à des tentatives de retour en arrière sur des pans entiers de l'intercommunalité. De même, nous saluons la défense de la loi SRU grâce à l'adoption d'un certain nombre de nos amendements : nous resterons très vigilants sur ce point lors de la CMP.

Tous les regards se tournent désormais vers celle-ci, qui devra se replonger dans ce que vous qualifiez, madame la ministre, de boîte à outils. Pour reprendre cette image, vous admettrez que les outils s'apparentent à ceux du bricoleur du dimanche : pas de quoi poser de nouvelles fondations, ni consolider une démocratie malade. Tout au plus, on se saisira des tournevis et des quelques clés qui permettront de rafistoler ce qui doit l'être. On se contentera donc de cette boîte à outils de fin de mandat : à l'image de nos débats, sans grand enthousiasme, nous voterons en faveur de ce texte.

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