Intervention de Aurélien Pradié

Séance en hémicycle du mardi 4 janvier 2022 à 21h30
Application de la loi visant à agir contre les violences au sein de la famille

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Pradié :

Monsieur le garde des sceaux, nous avons adressé le 7 décembre dernier un courrier à vous-même, au Premier ministre et au ministre de l'intérieur pour préparer avec sérieux cette séance de contrôle, courrier dans lequel nous posions trente questions précises, factuelles et minutieuses : combien de bracelets antirapprochement (BAR) sont réellement disponibles ? Combien ont été demandés dans le cadre d'une ordonnance de protection ? Combien de refus de le porter ont fait l'objet d'une transmission au parquet et, suite à ces refus, combien de placements en détention provisoire ont été demandés par ce dernier ? Quelles sont les juridictions qui en ont le plus délivrés et combien ont été retirés à la demande de la victime ?

Combien de téléphones grave danger ont été remis aux victimes et rendus par celles-ci avant le terme de la mise à disposition ? À quelle fréquence est-il utilisé en moyenne par une victime ?

S'agissant de l'interdiction de détention d'armes par l'ordonnance de protection, combien d'entre elles l'ont imposée ? Quel est le nombre d'armes visées par ces ordonnances et combien ont été récupérées réellement par les services de l'État ? Quel service exécute le jugement en matière d'interdiction d'armes, et comment s'organisent leur récupération et leur stockage ? La personne visée par cette interdiction récupère-t-elle son arme par la suite ?

Pour ce qui est des centres de prise en charge des auteurs de violences conjugales, nous demandions quel était le budget global affecté à ces centres, sur quelle mission, programme et action, ainsi que le budget moyen pour chacun d'entre eux.

Monsieur le garde des sceaux, trente questions précises. Et si je les rappelle ici, c'est parce que vous avez daigné nous adresser une réponse aujourd'hui… à dix-neuf heures quarante-deux, moins de deux heures avant notre débat. Je ne sais pas si c'est l'idée que vous vous faites du respect du travail parlementaire, mais nous, ce n'est pas l'idée que nous nous en faisons. Le travail parlementaire comme les mesures de protection des femmes victimes de violence méritent un peu mieux que de s'en occuper à la dernière minute. Permettez-moi de vous dire qu'en daignant répondre à tant de questions non pas dans le mois qui précède ce débat, mais quelques dizaines de minutes avant, vous démontrez que vous prenez la représentation nationale pour une assemblée d'imbéciles. Et la représentation nationale n'aime pas être prise pour une imbécile.

Nous sommes là pour vous contrôler, là pour dépasser vos opérations de communication, là pour évaluer ce qui est fait concrètement et non pas seulement ce qui est communiqué ; oui, alors que 113 femmes ont été assassinées l'année passée, nous sommes là pour vous demander des comptes.

Je commence par l'utilisation du bracelet antirapprochement : dans votre réponse de dernière minute, vous indiquez que seulement douze de ces bracelets sont actifs dans le cadre des ordonnances de protection – douze, alors que 210 000 femmes sont estimées victimes de violences sur une seule année dans notre pays. Il me semble qu'il n'y a pas de quoi pavoiser, ni hier, ni ce soir. Disons les choses comme elles sont : c'est dérisoire et vous êtes très loin d'être à la hauteur.

Quant au logement, notre loi a prévu la création d'un comité de pilotage chargé de suivre deux dispositifs prévus par l'article 15 de ladite loi. Le Gouvernement a daigné publier un décret de quelques lignes un an après la promulgation de la loi pour instituer ce comité, et il aura fallu deux années pour qu'il consente enfin à le constituer alors que le logement est un sujet si essentiel. Votre collège chargée du logement m'a fait savoir, il y a à peine quelques jours, étrangement juste avant ce débat, qu'enfin elle allait installer ce comité de pilotage.

Quant au budget concernant les centres de prise en charge des auteurs de violences conjugales, parmi les mesures annoncées pompeusement à l'issue du Grenelle, en septembre 2019, figure l'ouverture de deux centres d'accueil par région pour les auteurs de violences. Vous m'écrivez dans votre réponse que vous arriverez péniblement à en ouvrir un par région, ce qui suffit à vous rendre fier ,

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