Je ne suis pas démagogue et je sais bien que les responsables politiques ont des électeurs. Selon leur électorat, ils sont donc plus ou moins favorables à la légalisation. La France est un pays centralisé et ne peut pas expérimenter des dispositifs comme le font les pays fédéraux. Il en découle un certain conservatisme et une réticence à engager certaines évolutions. Une telle approche est d'ailleurs sensée, selon moi, puisque chaque réforme décidée doit être menée à grande échelle. Les expérimentations sont plus naturelles aux États-Unis : certains États sont très conservateurs, mais d'autres lancent des politiques innovantes.
Dans une économie ouverte, certaines évolutions sont toutefois inéluctables. Quand des conventions de l'ONU l'autoriseront, le commerce du cannabis sera possible entre les pays. Pour le moment, il est interdit et la vente légale de cannabis est limitée au marché intérieur des pays qui l'ont autorisée. Mais le trafic transfrontalier entre la France et ces pays va immanquablement se développer et engendrer chez nous de nouveaux problèmes. Alors que nos voisins enregistreront des rentrées fiscales, nous ferons face à de nouveaux dealers.
L'évolution est inéluctable, mais je comprends qu'il soit difficile de s'y résoudre dans le contexte de la campagne présidentielle. Si ses électeurs sont farouchement opposés à la légalisation du cannabis, un responsable politique qui a besoin de leur soutien ne peut qu'hésiter à la défendre. Les députés ont un rôle très important à jouer en tant que représentants du peuple français. C'est de vous que viendront les évolutions. En tout état de cause, je considère, en tant qu'économiste, qu'elles sont inéluctables.