Intervention de Jean-Pierre Cubertafon

Séance en hémicycle du jeudi 6 janvier 2022 à 15h00
Légalisation du cannabis : évolutions européennes blocages français

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Cubertafon, psychologue clinicien, membre du réseau Addictions France :

Dans le temps imparti, il n'est pas facile de répondre à tous les aspects de votre importante question, madame la députée, mais, si nous pouvions nous revoir, nous pourrions vous apporter plus de précisions. Pour ma part, je vais insister sur trois points, en complément de l'intervention d'Emmanuelle Auriol.

Premier point : l'angoisse légitime que ressentent les parents à l'égard de leurs enfants. Un nombre incroyable d'études montre l'efficacité de certains programmes de prévention centrés sur le développement des compétences psychosociales. En fait, il s'agit d'actions très pratiques conduites dans l'Éducation nationale. Rendons hommage à ces initiatives qui voient le jour, hélas petit à petit et à doses infinitésimales, la France ayant dans ce domaine un énorme retard par rapport à d'autres pays.

Ces actions associent les familles et les jeunes en milieu scolaire. Elles permettent de doter ces derniers de ressources supplémentaires au moment où ils sont susceptibles d'arriver sur le marché. Pourquoi consomme-t-on ? À cause du stress, des angoisses, des questionnements. En raison de leur statut de substances psychoactives, ces produits ont le pouvoir magique de soulager ces maux en quelques minutes. À court terme, les effets de la substance l'emportent sur ceux de l'éducation.

La solution n'est pas de diaboliser les produits et de pénaliser un marché de façon artificielle. Il faut se donner les moyens de mener une vraie politique de prévention éducative. Nous avons, je le répète, d'énormes progrès à faire dans ce domaine.

Deuxième point : quel est le risque d'aller trop loin ? Je répète qu'une politique de régulation ne consiste pas à ouvrir grand les vannes avant de renoncer à toute action. Il faudrait d'ailleurs engager un débat de fond sur le sujet. Le but d'une telle politique, c'est de sortir progressivement d'un marché parallèle qui fait d'énormes dégâts – d'où la notion de transition.

Nous ne devons pas avoir peur d'un hypothétique marché noir du cannabis, à l'image de celui qui existe pour le tabac. De fait, nous sommes en train de gagner la bataille d'une France sans tabac. Certes, il existe encore un marché noir. Certes, nous aimerions qu'il n'y ait plus de voleurs, de trafiquants ou de vendeurs à la sauvette. Cela étant, si nous poursuivons la politique actuelle de réduction des risques et de régulation financière, la lutte contre le tabagisme sera globalement un succès. Un marché légal permet en effet à l'État de mener beaucoup plus de contrôles et d'actions qu'un marché illégal.

Troisième point : je vous assure que l'on ne passe pas aussi facilement que cela d'un produit à un autre. J'ai conscience de ne pas vous avoir convaincue sur ce point – d'où l'intérêt de se rencontrer à nouveau. Il me faudrait du temps pour étayer mon propos, et je tiens à respecter les règles du jeu, c'est-à-dire à faire des réponses courtes.

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