Intervention de Bruno Laforestrie

Séance en hémicycle du jeudi 6 janvier 2022 à 15h00
Légalisation du cannabis : évolutions européennes blocages français

Bruno Laforestrie, directeur de Radio Mouv' :

Je ne m'étendrai pas sur les questions sur lesquelles le spécialiste vient de livrer son analyse, mais je reviendrai d'un mot sur celle que j'ai évoquée au début de mon intervention concernant les jeunes qui consomment du cannabis et surtout ceux qui en vendent – car la police se concentre essentiellement sur les vendeurs et sur le marché, donc le brassage d'argent, auquel ils contribuent.

Soyons clairs : le danger, à mon sens, n'est pas que de jeunes vendeurs de cannabis commencent, en cas de légalisation, à vendre beaucoup plus de cocaïne ou d'héroïne – je soulignerai plutôt qu'en restreignant comme on est en train de le faire l'accès légal au CBD, on incite des jeunes à s'adresser à des trafiquants, ce qui constitue tout de même une politique publique particulière. En revanche, si rien n'est fait, il paraît évident qu'en privant de revenus – même si ces derniers se limitaient à 1 000 ou 1 500 euros – une population exposée dans le même temps à un chômage endémique, on risque d'encourager, non pas le report sur le trafic de cocaïne, mais la commission de tous types de larcins, comme des vols ou des braquages. Les gros trafiquants, quant à eux, changeront d'activité. C'est une question importante.

On revient donc au constat de départ : on ne peut pas accepter qu'il existe, en France, des zones où 35 % à 40 % des jeunes sont au chômage. Le Gouvernement a lancé le plan « 1 jeune, 1 solution », mais ce dernier doit également permettre de traiter les situations les plus difficiles. Cela supposera – c'est tout l'enjeu – d'injecter beaucoup d'argent public, comme cela sera peut-être fait à Marseille. Dans tous les cas, la « transition cannabis » ne se fera pas en trois mois, en levant toutes les sanctions pour assécher les revenus du trafic : elle prendra trois, quatre, voire cinq ans. Il sera instructif de voir comment les Allemands traiteront la question, ce pays de 80 millions d'habitants comptant lui aussi des zones de pauvreté et des banlieues difficiles et étant confronté à tous les enjeux connexes qui touchent la France.

Ainsi, si l'on ne saurait affirmer que la légalisation du cannabis ne présente aucun risque d'effets collatéraux en matière de délinquance, nous connaissons déjà une situation de délinquance endémique et d'ultraviolence. Il faut donc agir, d'une manière ou d'une autre.

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