Intervention de Jean-Baptiste Moreau

Séance en hémicycle du jeudi 6 janvier 2022 à 15h00
Légalisation du cannabis : évolutions européennes blocages français

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Baptiste Moreau :

Même si c'est un plaisir sans cesse renouvelé d'être en votre compagnie, madame la secrétaire d'État, je regrette d'autant plus l'absence du ministre de l'intérieur que nous aurions eu l'occasion de lui parler de notre rapport d'information, dont il n'a visiblement pas pris connaissance. Avec mes deux corapporteurs, Mme Caroline Janvier et M. Ludovic Mendes, nous avons eu la possibilité de le présenter au ministre des solidarités et de la santé, Olivier Véran, mais pas au ministre de l'intérieur. Cela aurait sans doute évité que soit rédigé un décret sur le CBD qui n'est absolument pas conforme au droit européen car, non seulement il interdit la vente de la fleur, mais il empêchera aussi toute création d'une filière française – ce qui était pourtant le souhait initial du Président de la République.

Ce décret est pour moi nul et non avenu. Tout cela est dommage car il comporte un certain nombre d'avancées : il permet en particulier d'exploiter la fleur, contrairement aux textes précédents ; il fixe un taux maximal de THC à 0,3 %, ce qui rend possible le développement de certains produits. Il reste que l'interdiction de la vente de la fleur et de la feuille empêchera la création d'une filière française. Des recours ont cependant été déposés – je pense que leurs auteurs auront gain de cause, car le décret n'est pas conforme au droit européen.

Plus généralement, contrairement à ce qui est répété sur les plateaux de télévision ou dans de nombreuses interviews, notre rapport ne préconise ni une légalisation pour tous ni des campagnes de publicité sur des panneaux de quatre mètres sur trois dans toutes les rues de France. Il s'agit de légaliser de façon encadrée et, évidemment, de prévoir une interdiction pour les mineurs, puisque nous connaissons les dangers sur les cerveaux en formation.

Comme vous l'avez dit, madame la secrétaire d'État, les exemples comme celui du Canada montrent qu'une légalisation encadrée par l'État, que ce soit en matière de prix ou de nature des produits, permet de diminuer la consommation des mineurs, qu'elle ne fait pas exploser celle des majeurs et qu'elle permet de réduire un certain nombre de problèmes de sécurité et de santé publiques en provoquant le démantèlement de réseaux qui sont privés d'une bonne partie de leurs ressources. Grâce à la légalisation, l'État peut donc reprendre la main pour affronter un problème de sécurité publique et de santé publique, alors que la prohibition, qui se pratique dans tous les pays depuis trente ans, échoue partout. J'ai l'esprit scientifique : les mêmes causes produisant les mêmes effets, la politique qui échoue partout continuera d'échouer quels que soient les paramètres que vous modifierez.

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