En préambule à ce débat sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, rappelons que la France, de par son histoire, a la particularité incontestable d'un passé colonial fort. À la fin du XIX
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, un vent d'autodétermination a soufflé. L'année 1946 a représenté une étape importante dans l'histoire de la France : d'un côté, la départementalisation conduisit à l'intégration politique, juridique et administrative dans l'Hexagone des plus anciennes colonies acquises sous l'Ancien Régime – La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane ; et de l'autre, une Union française fut créée, regroupant notamment les territoires d'outre-mer que nous représentons dans le Pacifique – dont la Polynésie, la Nouvelle-Calédonie, Wallis et Futuna.
Actuellement, cette dizaine de territoires ultramarins répartis dans trois océans fait la diversité et la richesse culturelle de notre République. Toutefois, chacun de ces territoires, chacune de ces collectivités a son histoire propre, au regard du passé colonial. La Nouvelle-Calédonie a connu une période très difficile et conflictuelle jusqu'en 1988, année où furent signés les accords de Matignon-Oudinot qui constituent les fondements de l'apaisement qui a mis aussi fin aux troubles et aux violences entre communautés.
Dix ans plus tard, un nouvel accord de Nouméa a été signé entre l'État, les indépendantistes et les non-indépendantistes, afin de revaloriser la culture kanak, créer de nouvelles institutions, prévoir un processus de transfert progressif – et irréversible, c'est vrai – des compétences. Au cours de toutes ces décennies, les forces politiques calédoniennes ont toujours recherché un consensus jusqu'à tracer la voie vers cette série de référendums, dans un objectif de dialogue, de paix et de rééquilibrage – élément très fort de ces accords.
Je tiens à insister sur le fait que ces accords tripartites reposent sur une double légitimité : la reconnaissance du peuple premier kanak de Calédonie et de ceux qui ont peuplé de longue date ce territoire, le peuple calédonien.
Deux référendums ont été en faveur du maintien dans l'espace français, mais les résultats ont été serrés, plus encore pour le dernier. En conséquence, le 8 avril 2021, les élus de l'Union nationale pour l'indépendance (UNI) et du FLNKS ont demandé l'organisation d'un troisième référendum.
Toutefois, le 20 octobre 2021, les indépendantistes ont demandé le report du scrutin prévu en décembre, pour des raisons sanitaires liées au covid-19. Malheureusement, leur demande n'a pas été acceptée et, sans surprise, la non-participation des indépendantistes a fortement marqué cette consultation, ce que je regrette profondément.
Rappelons que ce scrutin s'est tout de même déroulé dans de bonnes conditions. Nous pouvons remercier l'État et tous les acteurs locaux qui ont fait en sorte d'assurer la paix. Nous avons tous suivi les opérations de très près, que l'on soit en outre-mer ou dans l'Hexagone car, il faut le dire, la situation était sensible et tendue.
Peut-on se satisfaire de ce résultat ? Les électeurs ont voté à plus de 90 % contre l'indépendance, mais le taux de participation n'a atteint que 43 %. Sur le plan juridique, le résultat est incontestable. L'est-il sur le plan moral, au regard de cette histoire et de cette recherche du consensus et du dialogue ?
Monsieur le ministre, nous savons que la tâche n'est pas facile. Nous arrivons au terme d'un très long processus, au cours duquel le dialogue a néanmoins toujours été de mise. À présent, à la suite de ces événements, nous souhaitons trouver les voies d'un retour de la confiance et du dialogue pour construire la suite, ce que la société civile et la jeunesse calédonienne attendent.
Nous avons pris acte de la demande de surseoir aux discussions jusqu'à la prochaine élection présidentielle. Comme les autres groupes, nous nous demandons comment vous allez gérer cette période transitoire et organiser la suite.
Il vous faudra beaucoup d'humilité et de respect pour l'histoire de ce territoire. Le gouvernement polynésien m'a d'ailleurs chargé de vous demander que la Polynésie soit désormais associée à ces discussions, car elles ont des répercussions au plan régional, sur l'organisation des territoires français du Pacifique. Nous souhaiterions pouvoir suivre et accompagner nos collègues du Pacifique pour relever cet énorme défi qui ne sera pas sans effets sur notre territoire.