Restaurer une justice de proximité permettant de lutter contre les incivilités et la délinquance du quotidien est une nécessité dans notre pays. Le groupe UDI et indépendants est évidemment favorable à cet objectif. Nos concitoyens doivent pouvoir compter sur leur justice au quotidien – une justice plus rapide et plus proche, à rebours de ce sentiment souvent partagé d'une justice trop éloignée.
Lors des discussions parlementaires, nous avions estimé que la proposition de loi devait être plus ambitieuse. Le Gouvernement semblait avoir de grands projets en la matière ; nous en attendons la concrétisation. Cela étant, le texte proposé par nos collègues du groupe Agir ensemble a apporté quelques bonnes mesures d'ordre pratique.
Nous avons adhéré aux deux axes principaux de la proposition de loi : élargir le champ des mesures pouvant être prononcées alternativement aux poursuites et faciliter le recours au travail d'intérêt général. Le Sénat ayant conservé l'esprit de ces dispositions, nous rappelons cependant les quelques réserves que nous avions déjà émises, en particulier le fait que la déjudiciarisation ne peut se concevoir que lorsqu'elle ne porte pas atteinte aux droits du justiciable. Les ajouts du Sénat ont utilement complété le texte. Je pense notamment à la mise en avant de la possibilité d'effectuer une transaction avec le maire, ou encore au fait que le dessaisissement de la chose qui a servi à commettre les faits ou du produit de l'infraction puisse être réalisé au bénéfice d'une personne morale à but non lucratif.
Enfin, les mesures à visée pédagogique sont toujours les bienvenues, comme la proposition d'effectuer un stage de responsabilité parentale. J'insiste sur ce point, car il est important de souligner qu'il peut y avoir d'autres réponses que la sanction pure et simple. Mettre en lumière cette idée est d'ailleurs l'un des atouts principaux de la proposition de loi. En ce sens, la rapidité ne doit pas toujours être l'argument principal des réformes de la justice.
Nous l'avons dit lors de la commission mixte paritaire (CMP), le groupe UDI et indépendants considère que ce texte, même s'il ne contient aucune mesure révolutionnaire, va dans le bon sens. La question porte maintenant sur l'application concrète des mesures proposées. Elles demandent un suivi renforcé qui peut représenter une charge de travail supplémentaire pour tous les magistrats et les auxiliaires de justice. Dans cette optique, nous réitérons notre appréhension devant la lenteur du recrutement des 1 100 emplois promis, la création des nouvelles unités médico-judiciaires, la mise en place des audiences foraines ou encore les nouvelles modalités d'action des délégués du procureur.
D'autres questions restent en suspens. La nouvelle contribution citoyenne doit-elle être interprétée comme une amende déguisée ? Comment peut-on s'assurer de la pertinence de ce dispositif ? Quelles sont les garanties d'effectivité pour les nouvelles mesures proposées et quel sera le suivi de l'exécution de ces obligations ? Il paraît difficile pour les magistrats du parquet, déjà débordés, d'effectuer cette tâche supplémentaire. De même, s'il paraît pertinent de simplifier les modalités d'exécution du travail d'intérêt général, cette décision ne doit pas conduire à sa complète déjudiciarisation.
Enfin, les mesures contenues dans la loi semblent assez loin de l'ambition de l'exposé des motifs appelant à « restaurer une justice de proximité luttant contre les incivilités et la délinquance quotidienne, en renforçant l'efficacité des réponses pénales ». C'est pourquoi il est pertinent d'évoquer tous ces soucis d'exécution de la loi améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale en votre présence, monsieur le garde des sceaux, et avec tous les groupes parlementaires, afin que les mesures soient à la hauteur de la loi votée.