Aujourd'hui, on dépense environ 300 millions d'euros par an entre les subventions aux assurances privées et le régime des calamités agricoles – M. le rapporteur vient de me confirmer ce montant ; demain, grâce à votre force de conviction, monsieur le ministre, vous mettrez 600 millions sur la table pour rendre le régime universel.
Notre amendement vise à préciser la nature des assurances privées qui compléteront le système assurantiel de nos producteurs, car il y a assurance privée et assurance privée. Certaines assurances privées relèvent quasiment du régime de l'économie sociale : les bénéfices sont réinvestis et partagés avec les assurés. En revanche, d'autres assureurs, au sommet du CAC40, ont des pratiques dans les paradis fiscaux et distraient l'essentiel de la valeur ajoutée dans des choix qui n'ont rien à voir avec ce que nous recherchons, que ce soit en matière de sécurité alimentaire, de maintien de nos producteurs, d'aménagement du territoire…
Quand on cautionne les assurances privées à hauteur de 600 millions d'euros, je crois qu'on peut demander qu'elles répondent à un minimum d'exigences éthiques. Je ne prétends pas avoir affaire aux compagnons d'Emmaüs ou aux Petits Frères des Pauvres, mais si l'on considère la taxonomie européenne, on pourrait par exemple demander que les assureurs s'engagent à respecter non seulement la loi, mais l'esprit de la loi, qu'ils pratiquent un partage de la valeur, bref, qu'ils rejoignent le mouvement mutualiste.
À défaut de s'inscrire dans un système mutualiste de CVO tel que nous le rêvions à gauche, nous demandons, dans une logique de compromis, que figure dans les débats du CODAR – puisque le texte renvoie au CODAR et aux ordonnances – l'exigence que les assureurs qui seront les partenaires de ce New Deal agricole pour la sécurité alimentaire soient des assureurs éthiques, des assureurs qui travaillent pour l'économie réelle et non pour l'économie spéculative, celle qui s'évade dans les paradis fiscaux.
Ne me dites pas que ce n'est pas possible : c'est une question de volonté politique. Une telle préoccupation peut trouver un écho bien au-delà de nos rangs et être partagée. J'espère obtenir des avis favorables – s'il faut rédiger un sous-amendement, je suis certain que nous trouverons des complices à gauche comme à droite.