Intervention de Julien Denormandie

Séance en hémicycle du mercredi 12 janvier 2022 à 15h00
Gestion des risques climatiques en agriculture — Article 3

Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation :

Encore une fois, je comprends ce que vous dites, mais l'animal qui se trouve dans le sac dont vous parlez ne se tire pas ; il faut le pousser ! C'est un principe intangible. En l'occurrence, monsieur Chassaigne, je ne cherche pas à vous tirer mais je ne m'explique pas votre crainte. En effet, l'interlocuteur agréé, c'est, par défaut, la DDT – direction départementale des territoires –, et, si vous ne voulez pas vous adresser à un autre opérateur, vous pourrez continuer à passer par elle. Mais faites un petit sondage parmi les agriculteurs de votre entourage : malgré le travail remarquable qu'accomplissent nos agents sur le terrain – je leur tire mon chapeau –, combien sont satisfaits alors qu'un an et demi après la sécheresse, l'indemnisation au titre des calamités agricoles ne leur a toujours pas été versée ?

Ensuite – c'est mon deuxième point –, dans la situation actuelle, au-dessus de 30 % de pertes, aucune indemnisation n'est prévue pour quelqu'un qui n'est pas assuré, y compris dans la prairie, puisque le CNGRA commence à intervenir lorsque les pertes excèdent 30 % de la production annuelle moyenne. Et pourtant, 1 % de nos éleveurs seulement sont couverts par l'assurance prairie.

Prenons l'exemple d'un éleveur qui, parce que nous aurons réussi à diminuer le coût de cette assurance, sera couvert pour des pertes situées entre 20 et 30 % de sa production et qui bénéficiera donc d'une assurance qui se déclenchera dès 20 % de pertes. Ne croyez-vous pas, monsieur le président Chassaigne, que l'éleveur qui aura fait ce choix, en acceptant l'offre proposée par un assureur, sera très content que ce même assureur lui verse par ailleurs, pour le compte de l'État, l'indemnisation prévue en cas de pertes excédant 30 %, seuil à partir duquel l'État interviendra ? À l'évidence, il le sera ! Qui peut le plus peut le moins et, en l'occurrence, nous proposons qu'il soit possible de passer par un réseau d'interlocuteurs agréés. Si l'éleveur ne le souhaite pas, c'est la DDT qui, par défaut, interviendra – on peut l'écrire au Journal officiel ! Mais, dans de nombreux cas, les agriculteurs eux-mêmes voudront passer par d'autres interlocuteurs. C'est une évidence !

J'ai déjà répondu par ailleurs concernant la minoration de 50 % de la prime d'assurance pour les exploitants non assurés. Quant à la prise en compte de la moyenne olympique comme base de calcul pour l'indemnisation des pertes de récolte, il s'agit – pour le dire simplement – du référentiel établi pour définir le niveau de subvention que l'État peut attribuer : de telles subventions ne peuvent être versées au titre des régimes d'aides publiques que si le référentiel utilisé est celui de la moyenne olympique. Cela renvoie en outre à des discussions en cours à propos de la boîte verte de l'OMC – Organisation mondiale du commerce. J'éviterai d'être trop technique mais c'est pour moi une préoccupation majeure, que nous devons exprimer dans les enceintes européennes et internationales, afin de faire évoluer les choses.

Enfin – vous le savez très bien, monsieur le député –, le problème majeur qui se pose lorsque l'on cherche à évaluer les dégâts causés par la sécheresse sur les prairies, c'est la méthode de calcul, qui est délirante : elle se fonde sur la pousse de l'herbe, en début de saison, alors que celle-ci n'est pas forcément en rapport avec la quantité de foin disponible à la fin – entre les deux, il a pu se passer plein de choses ! C'est ce système que nous voulons améliorer, puisqu'il ne fonctionne pas, afin que l'indemnisation soit finalement la plus proche possible de la réalité vécue par l'éleveur. Mais nous ne voulons pas pour autant créer une usine à gaz, car il faut que le versement soit rapide. Voilà le double défi auquel nous cherchons à répondre.

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