Intervention de Lise Magnier

Séance en hémicycle du jeudi 13 janvier 2022 à 9h00
Reconnaissance de l'endométriose comme une affection de longue durée — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLise Magnier :

« L'endométriose. Ce n'est pas un problème de femmes, c'est un problème de société. » Je veux tout d'abord exprimer au nom du groupe Agir ensemble mes très sincères remerciements au Président de la République pour s'être exprimé ainsi cette semaine sur ce sujet. Oui, si l'endométriose est une maladie exclusivement féminine, elle concerne bien l'ensemble de notre société, car elle a des conséquences pour les plus jeunes femmes, les adolescentes, les couples, les familles, les proches, les collègues. Vous l'avez dit, chère Clémentine Autain, cette pathologie fait souffrir dans leur chair environ 2 millions de femmes en France.

Cette maladie, dont les symptômes sont variables, se traduit, selon son stade, par des saignements abondants, de violentes douleurs, des troubles du sommeil, l'incapacité de rester debout, des malaises voire des états dépressifs. En cela, les femmes atteintes – une femme sur dix – voient leur quotidien mis à mal, que ce soit dans leur vie professionnelle, amoureuse ou relationnelle. Cette maladie pose bien un problème qui nous concerne tous puisqu'elle demeure la première cause d'infertilité dans notre pays.

Pourtant, alors que c'est un problème de santé publique majeur – massif même –, il est frappant de constater à quel point l'endométriose reste une souffrance invisible. On continue à éduquer nos jeunes filles selon un principe archaïque et intolérable : « Tu es une femme, tu as tes règles, tu as mal, c'est normal. » Non, disons-le haut et fort, il n'est pas normal de souffrir du seul fait d'être une femme !

Les conséquences de cette absence de reconnaissance sont graves. En matière de dépistage, tout d'abord : la honte de parler de ses règles douloureuses, le manque de sensibilisation du grand public et de formation des professionnels de santé induit un retard quasi systématique de diagnostic. En moyenne, l'endométriose est ainsi repérée après sept ans d'errance médicale, sept ans pendant lesquels la maladie évolue, s'installant souvent de manière irréversible dans le corps des femmes.

Le tabou se répercute aussi sur la recherche. Alors que la pathologie n'est pas nouvelle, la recherche sur l'endométriose en est encore à ses balbutiements, comme c'est le cas pour toutes les ménorragies. Aucun traitement ne permet aujourd'hui de vaincre définitivement la maladie. Les principales solutions thérapeutiques se limitent à l'amoindrissement des douleurs, sans toutefois les éliminer ; les autres sont très invasives.

C'est aussi un sujet de société qui renvoie à des problèmes d'inégalité d'accès aux soins et de défaut de diagnostic. Quand la maladie a pris trop d'ampleur, l'accès au parcours d'aide médicale à la procréation est malheureusement encore beaucoup trop compliqué dans les territoires ruraux éloignés des métropoles. Pire, quand la maladie a atteint un stade avancé, faute de connaissance des autres techniques et traitements existants, la chirurgie est parfois la seule solution proposée, alors qu'elle est traumatisante. L'atlas des variations des pratiques médicales révèle que certains départements ruraux ont un taux de recours moyen à l'hystérectomie très supérieur à la moyenne française, de 192 pour 100 000 femmes. Chaque année, ce sont 20 à 25 000 femmes qui subissent cette opération traumatisante alors même que cet acte aurait pu être évité si le diagnostic avait été posé plus tôt et que les professionnels avaient été mieux formés aux chirurgies conservatrices respectueuses de la femme.

L'endométriose est donc un sujet éminemment important et je remercie très sincèrement nos collègues du groupe La France insoumise de l'avoir inscrit à l'ordre du jour de leur niche parlementaire.

Les annonces du Président de la République apportent les nécessaires réponses à ce problème, dans le cadre du tout premier plan de lutte contre l'endométriose. Elles permettent à la France d'être l'un des premiers pays à faire de cette maladie un véritable sujet de santé publique. Elles se fondent sur cinq piliers : la sensibilisation du grand public, la formation des professionnels de santé, l'amélioration du dépistage, l'équité territoriale dans l'accès aux soins et le développement de la recherche.

La présente proposition de résolution, que j'ai moi-même signée, vient apporter une réponse supplémentaire et nécessaire, en prévoyant d'inscrire l'endométriose dans la liste ALD 30. Cela permettra aux femmes de bénéficier d'une prise en charge plus adaptée, mais aussi de recevoir plus rapidement des traitements et des soins mieux remboursés. Nous le leur devons.

Il est urgent de briser le tabou et de faire en sorte que nos sœurs, nos filles et nos amies puissent ouvertement parler de leurs souffrances et bénéficier d'une prise en charge adaptée et personnalisée. Vous l'aurez compris, le groupe Agir ensemble soutiendra avec conviction cette proposition de résolution.

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