Intervention de Valérie Six

Séance en hémicycle du jeudi 13 janvier 2022 à 9h00
Reconnaissance de l'endométriose comme une affection de longue durée — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Six :

« L'endométriose me gâche la vie. » Ces mots sont ceux d'Amélie, une jeune femme atteinte d'endométriose, et résonnent pour de nombreuses malades. Ils en disent long sur les conséquences physiques, sociales et psychologiques de cette maladie chronique de l'endomètre.

Au-delà des souffrances, c'est à l'errance médicale et au manque de reconnaissance que ces femmes doivent faire face. Il s'agit d'un véritable parcours du combattant, face à des professionnels de santé insuffisamment formés, mais aussi à des procédures de soin longues et inadaptées. Il ne faut pas non plus oublier la stigmatisation et la perte de chance économique engendrées, car l'endométriose est un véritable handicap. Elle affecte directement la capacité des femmes à travailler et à étudier, avec des conséquences sur leur statut social, leur carrière et leur famille.

C'est pourquoi je me réjouis de nous voir réunis autour de cette proposition de résolution, qui s'attache particulièrement à la question du travail en invitant le Gouvernement à inscrire l'endométriose sur la liste des affections longue durée. Cette reconnaissance est nécessaire, car les absences du lieu de travail pour motif de soins ont des conséquences financières concrètes, avec l'enchaînement de journées de carence en cas d'arrêts maladie répétés. Mal comprises par l'employeur et les collègues, elles entraînent une stigmatisation dans le milieu professionnel, et peuvent freiner l'avancement des carrières. Dans le pire des cas, quand la personne ne peut plus travailler, elle se retrouve sans ressources.

Au-delà de la prise en charge à 100 % par l'assurance maladie, l'inscription sur la liste des ALD permettra une meilleure reconnaissance institutionnelle de l'endométriose, importante puisque l'on constate aujourd'hui un fort taux de non-recours. Par renoncement, de nombreuses malades ne feraient pas la demande pour bénéficier d'une ALD hors liste et une grande majorité d'entre elles renonceraient à demander un arrêt maladie à leur médecin durant les périodes de douleurs. L'inscription sur la liste des ALD permettra de normaliser cette maladie en l'inscrivant dans un cadre juridique concret.

Toutefois, cette mesure ne sera pas suffisante. D'abord, parce que sans diagnostic, toute reconnaissance de la maladie est vaine. Le retard du monde médical sur le sujet est un problème sur lequel il nous faut avancer. À ce titre, la stratégie nationale lancée en mars 2021 par M. le ministre Olivier Véran est nécessaire, mais elle doit aller beaucoup plus loin et surtout beaucoup plus vite. D'une part, la propagation des lésions causées par l'endométriose est irréversible et il est tout simplement inacceptable de devoir attendre sept ans pour se voir poser un diagnostic. D'autre part, il y a urgence à améliorer la prévention, lorsqu'on sait que cette maladie a des facteurs génétiques reconnus.

Pour cela, des propositions concrètes ont été faites par les associations et les axes sont bien identifiés. Tout d'abord, il faut insister sur la formation initiale et continue du corps médical à tous les niveaux, afin d'améliorer la détection et la prise en charge des symptômes. Ensuite, un parcours de soins spécifique à l'endométriose doit être créé. La mise en place de centres d'expertise dédiés à sa prise en charge apparaît comme une nécessité. Enfin, notre pays doit avancer sur la recherche. En août dernier, l'université d'Oxford a découvert un gène qui pourrait être à l'origine des formes les plus graves de la maladie, ouvrant ainsi la porte à un traitement. Les avancées sont donc possibles et nous devons être en première ligne. Il nous faut donc des moyens et une stratégie.

Ces propositions, on les retrouve dans la très récente communication du Président de la République sur la stratégie nationale de lutte contre l'endométriose. Mais je ne peux m'empêcher de m'inquiéter face à cette accumulation d'annonces : rappelons que cette stratégie avait été annoncée dès 2017, avec pour seul résultat concret la remise d'un rapport. Quand ces éléments seront-ils réellement instaurés ? Comment ? Avec quels moyens ? Que dire aussi de l'absence, dans ces déclarations, de la mention de l'inscription de l'endométriose sur la liste des ALD ? Ne pourrions-nous pas aller encore plus loin ? Par exemple, les femmes de moins de 25 ans bénéficient aujourd'hui de la prise en charge intégrale de la pilule ; pourquoi ne pas l'ouvrir aux femmes atteintes d'endométriose, pour qui la pilule représente à ce jour l'unique solution pour éviter les douleurs ? Nous attendons davantage ; surtout, nous n'avons plus le temps de tergiverser.

Nous remercions le groupe La France insoumise, notamment Clémentine Autain, de mettre cette proposition de résolution en débat – débat dont nous attendons beaucoup. Le groupe UDI et indépendants votera avec conviction pour la proposition de résolution.

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