Intervention de Nicole Trisse

Séance en hémicycle du lundi 17 janvier 2022 à 16h00
Condamnation du régime d'alexandre loukachenko — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Trisse :

La proposition de résolution de Frédéric Petit appelle à une condamnation ferme et sans ambiguïté d'un régime dictatorial recroquevillé sur lui-même, et d'un dirigeant qui ne recule devant aucun moyen pour maintenir son emprise sur les Biélorusses.

Le Bélarus d'Alexandre Loukachenko a toujours connu un régime à part au sein de l'Europe continentale. Dernier pays d'Europe à appliquer la peine de mort, il est aussi le seul à ne pas être membre du Conseil de l'Europe, ce qui empêche ses citoyens d'avoir recours à la Cour européenne des droits de l'homme.

Les élections successives du président Loukachenko depuis 1994 sont émaillées de soupçons de fraudes et d'intimidation des autres candidats. Nous le savions déjà. Désormais, nous pouvons affirmer sans détour que, depuis deux ans, le régime de Minsk a atteint un point de non-retour en matière de répression et d'atteintes aux libertés. D'ailleurs, l'élection présidentielle du 9 août 2020 n'a été reconnue légitime ni par les États européens, ni par le Conseil de l'Europe, ni même par les Biélorusses, puisque son résultat a entraîné de nombreuses manifestations pacifiques dans tout le pays.

Pourtant, leur président n'a pas hésité à utiliser tous les moyens, particulièrement les plus répressifs, pour briser cet élan, cette demande légitime de démocratie et de transparence. Une tempête d'arrestations, de détentions arbitraires, de passages à tabac, d'emprisonnement dans des conditions indignes, s'est abattue sur les manifestants pacifiques. Des opposants ont été contraints à l'exil ou arrêtés de manière arbitraire. Certains ont péri.

Je pense en particulier à Svetlana Tikhanovskaïa, qui a dû fuir en Lituanie la nuit suivant le scrutin, et à Maria Kolesnikova, qui a été condamnée à onze ans de prison – le Conseil de l'Europe lui a décerné le prix des droits de l'homme Václav-Havel, en octobre dernier. Je pense aussi aux personnalités politiques et aux hauts fonctionnaires, tels que Pavel Latouchka, qui ont pris tous les risques en refusant de cautionner les exactions du régime, et ont dû s'exiler.

Voilà donc la réalité du Bélarus : des centaines de prisonniers politiques, des manifestations et des grèves réprimées, des opposants pourchassés et arrêtés, des avocats empêchés d'exercer, une presse bâillonnée et des organisations non gouvernementales (ONG) interdites. La désinformation massive, que pratiquent les chaînes de télévision et les radios officielles, complète ce travail de sape auprès de la population.

Par son acharnement à se maintenir au pouvoir, non seulement le président Loukachenko menace les libertés individuelles de ses compatriotes, mais il met en danger l'équilibre géopolitique en bafouant toutes les règles internationales. Son régime s'est comporté comme celui d'un État voyou, en détournant un avion de ligne de Ryanair pour mettre la main sur l'opposant Roman Protassevitch. Il ne recule devant aucune ignominie lorsque son dirigeant utilise la détresse de milliers de migrants, qu'il entasse aux frontières de la Pologne et de la Lituanie, dans le seul but de provoquer l'Union européenne, car celle-ci refuse de lui concéder une quelconque légitimité.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons rester indifférents aux agissements de celui que Condoleezza Rice, ancienne secrétaire d'État américaine, surnommait le dernier dictateur d'Europe. Soutenir l'opposition en exil et la reconnaître comme la représentante légitime de son peuple m'apparaît donc comme une évidence. Il est également nécessaire de continuer la politique de sanctions économiques contre Minsk, tant que n'aura pas été amorcée l'évolution favorable à la démocratie que les Biélorusses demandent.

Enfin, les Russes étant seuls à soutenir le régime en place, il m'apparaît indispensable de discuter avec eux, afin de les convaincre d'enjoindre à Loukachenko de proposer de nouvelles élections démocratiques.

Chers collègues, cette résolution est la bienvenue et je remercie Frédéric Petit de nous la proposer car il est urgent d'entériner notre appui au peuple biélorusse qui s'épuise et a besoin d'aide. Ne nous y trompons pas : chaque action que nous entreprenons en ce sens exerce une pression supplémentaire sur le régime d'Alexandre Loukachenko.

Bien sûr, nous étions déjà plusieurs parlementaires impliqués dans la résolution de cette crise, grâce notamment au groupe d'amitié France-Biélorussie, présidé par Christophe Lejeune, à l'OSCE – je salue Sereine Mauborgne –, et au Conseil de l'Europe, en particulier à sa délégation française dont j'ai l'honneur d'être la présidente. Mais il est temps que le Parlement tout entier s'inscrive dans cette démarche. C'est pourquoi le groupe La République en marche soutient cette proposition de résolution qui appelle à condamner fermement le régime de Loukachenko et ses agissements, et demande la tenue de nouvelles élections.

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