Intervention de Vincent Ledoux

Séance en hémicycle du jeudi 20 janvier 2022 à 9h00
Urgence contre la désertification médicale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVincent Ledoux :

…pour mieux maîtriser les dépenses de santé. Cette machine à faire fondre les effectifs des promotions successives a redoutablement bien fonctionné, et nous avons tardé à prendre conscience que nous courions à la catastrophe. La suppression du numerus clausus était urgente et, grâce à cette décision, plus de 10 000 étudiants sont actuellement inscrits en deuxième année. Mais il est vrai qu'elle ne portera ses fruits que sur le temps long du fait de la longueur des études de médecine.

Le second levier d'action consiste à renforcer l'attractivité de l'offre libérale car les chiffres sont particulièrement préoccupants : environ 10 % seulement des internes choisissent la médecine générale. La désaffection des étudiants pour ce parcours doit nous interpeller mais je ne crois pas que la contrainte soit la solution. Je rappelle qu'au-delà des incitations financières dont on a bien vu les limites, beaucoup a déjà été fait par la majorité pour rendre plus attractive la médecine de ville, notamment avec la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé : je pense d'abord au développement de l'exercice coordonné à travers les communautés professionnelles territoriales de santé et les maisons de santé, mais aussi au recrutement d'assistants médicaux pour libérer du temps de consultation ou encore, Mme la ministre déléguée le rappelait, au stage obligatoire pour les étudiants en médecine.

J'insiste sur ce dernier point car il est essentiel de rapprocher la formation des zones sous-denses pour susciter l'envie, chez les futurs médecins, de s'installer sur ces territoires. Nous avons aussi agi sur le développement de la télémédecine car le recours aux outils numériques fait pleinement partie de la réponse à très court terme dans les territoires les plus carencés. Enfin, la montée en compétences des autres professionnels de santé, qu'ils soient infirmiers, pharmaciens ou sages-femmes, devrait permettre la continuité des soins en proximité. Toutes ces mesures apportent des solutions concrètes pour bon nombre de nos concitoyens qui résident dans les territoires les plus sous-dotés.

Mais il n'y a pas de solution miracle à la pénurie de médecins. À cet égard, je ne crois pas à l'efficacité du conventionnement sélectif. L'implantation réglementée ne fonctionne en effet que pour des professions dont le vivier est suffisamment vaste pour répondre à l'ensemble des besoins du territoire. Or il n'y a pas d'endroit en France où les médecins sont aujourd'hui trop nombreux. On retirerait alors à l'un pour donner à l'autre, dans une sorte de jeu à somme nulle totalement inefficace. Certains médecins pourraient même en l'occurrence choisir d'exercer hors convention, créant ainsi une médecine à deux vitesses qui va à l'encontre du principe d'égalité dans l'accès aux soins, principe auquel nous sommes tous résolument attachés.

La désertification médicale constitue évidemment un problème sanitaire d'ampleur alors que s'accentuent, dans le même temps, le phénomène de vieillissement de la population et la prévalence des maladies chroniques. L'objectif du rapporteur est donc parfaitement louable et nous partageons pleinement ses préoccupations. Mais contraindre les médecins dans leur choix d'implantation ne nous paraît toutefois pas approprié à l'heure actuelle au regard des effets pervers qu'entraînerait une telle décision, d'autant que cela n'aurait aucun réel impact positif sur les territoires les plus sous-dotés. En conséquence, le groupe Agir ensemble votera contre ce texte.

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