Malgré la crise sanitaire qui monopolise, embolise même notre agenda, je suis heureux que nous ayons su nous saisir de ce texte, quand certains nous accusaient de renoncement. Je suis heureux que nous ayons su le défendre ici et nous rassembler uniquement pour l'adopter. Je félicite la rapporteure, Laurence Vanceunebrock, d'avoir mené ce combat sans faillir et sans jamais douter. Je suis fier que nous ayons su, très vite, trouver un terrain d'entente avec nos collègues sénateurs pour aboutir à une CMP conclusive qui nous permet de nous retrouver ce soir pour la dernière étape.
Nous le devions à celles et à ceux qui subissent des comportements insupportables qui ne sont ni des thérapies ni des conversions. Nous le devions à toutes celles et à tous ceux qui n'osent pas parler, qui n'osent pas porter plainte. Oui, si vous en doutiez encore, vous pourrez désormais pousser la porte d'un commissariat ou d'une gendarmerie pour porter plainte contre ces méfaits ; vous pourrez témoigner devant un juge, car ce qui vous arrive n'est pas normal, contrairement à ce que certains affirment ; vous n'êtes pas des monstres, vous n'êtes pas des malades, mais vous êtes des victimes.
On peut s'étonner qu'un tel texte soit encore nécessaire. Il y a déjà quarante ans, en août 1982 à cette même tribune, Robert Badinter défendait une loi attendue et nécessaire, une loi pour abolir les dernières dispositions du code pénal qui, à l'époque, punissaient encore les relations homosexuelles. Il y a trente-deux ans, en 1990, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) retirait l'homosexualité de la liste des maladies mentales, confirmant ce que beaucoup d'entre nous savaient déjà : il n'y a rien à guérir. Des décennies plus tard, après tout le chemin parcouru pour l'égalité des droits, après le pacs et le mariage pour tous, après l'ouverture de la PMA aux couples de femmes, il est temps que certains comprennent enfin que l'homosexualité n'est pas un délit, qu'elle n'est pas une maladie, pas plus que la transidentité ; nous allons les y aider.
Au contraire, ce sont bien l'homophobie et la transphobie qui sont des délits. Nous le proclamons encore un peu plus haut et un peu plus fort avec cette nouvelle loi. Elle punira sévèrement ceux qui imaginent que leur morale et leur vision étriquée de la société les autorisent à torturer mentalement, ou même physiquement, ceux qui ne rentrent pas dans les cases auxquelles ils les ont assignés. Les témoignages que nous avons entendus à ce sujet sont plus que glaçants. L'homophobie et la transphobie doivent, d'une certaine façon, être à leur tour soignées. C'est là un beau défi, avec un patient travail d'éducation et de prévention. Madame la ministre déléguée, je tiens à cette occasion à saluer le travail du Gouvernement, incarné par la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH), qui y consacre des moyens, de l'énergie et bien sûr beaucoup de pédagogie.
En conclusion, je vous propose de regarder au-delà des frontières : à l'heure où la France assume la présidence du Conseil de l'Union européenne, c'est à son honneur de prouver en actes son attachement aux valeurs fondamentales de respect et de tolérance qui fondent la communauté de destin de notre continent. Je tiens au passage à rendre hommage à notre collègue Caroline Abadie, qui ne peut malheureusement pas être présente ce jour et qui a été une vraie partenaire aux côtés de Laurence Vanceunebrock. Depuis quelques années, certains pays remettent en cause cette liberté et cette tolérance : la Pologne, avec des régions qui se déclarent « LGBT free » ; la Hongrie, qui interdit toute représentation de l'homosexualité dans l'espace public ou dans les publicités. Ce soir, en adoptant définitivement la proposition de loi, nous disons à nos concitoyens européens visés par ces discours d'exclusion et de haine, que la France est avec eux et qu'elle se mobilisera toujours pour eux. Nous envoyons un message clair : en France, pas plus qu'en Europe, on ne force quelqu'un à changer d'orientation sexuelle ou de genre. Madame la rapporteure, très chère Laurence, je ne doute pas que vous partagerez avec nous ce combat et que vous le mènerez peut-être au-delà de nos frontières.
Mes chers collègues, c'est donc avec une fierté immense, qui – je l'espère – sera partagée par l'ensemble des bancs, que les députés du groupe La République en marche voteront la proposition de loi.