Il y a plus de soixante-quinze ans, Henri Grouès siégeait sur ces bancs. Le combat de l'abbé Pierre perdure et sa voix continue de porter. Nous débattons aujourd'hui du mal-logement, alors que la Fondation Abbé-Pierre remettra son rapport mercredi. Ce débat est l'occasion de réaliser un bilan de notre action.
Avec la loi ELAN, l'accessibilité au logement, la cohésion sociale et le logement social ont été renforcés, tout en construisant plus, mieux et moins cher.
Le dispositif MaPrimeRénov', lancé en 2020, a permis d'accroître les travaux de rénovation énergétique des bâtiments afin que les plus précaires ne se retrouvent pas doublement pénalisés. Le projet de loi 3DS a pérennisé le dispositif SRU en le rendant plus efficace. Le groupe Agir ensemble s'est d'ailleurs engagé afin d'introduire une réelle mixité sociale et de lutter contre la ghettoïsation dans les communes.
Mais le débat doit surtout être l'occasion de proposer des pistes pour l'avenir. Il nous reste encore de nombreux défis à relever ; le plus urgent est celui du grand âge. Dès aujourd'hui, nous devons repenser le logement de nos aînés, surtout pour ceux qui se trouvent en grande précarité. Le logement doit être à la fois sur mesure, accessible, rapidement disponible, selon l'état de santé et de mobilité du résident – nous savons combien la dégradation peut-être hélas très rapide et prendre de court la personne elle-même et sa famille.
La solution ne consiste pas toujours à finir sa vie en EHPAD, l'actualité nous le démontre encore. Le logement social d'aujourd'hui et de demain doit donc s'adapter à cette demande qui n'est pas assez satisfaite. Cette semaine encore, une femme m'a sollicité pour son papa malade qui avait besoin d'un logement en rez-de-chaussée, mais surtout avec une douche. J'ai demandé à cette personne pourquoi son propriétaire ne voulait pas remplacer la baignoire par une douche – question banale mais qui avait son importance. Réponse de l'intéressée : parce qu'elle ne le veut pas.
Le logement pour le grand âge n'est donc pas que l'affaire de l'État. C'est l'affaire de la société tout entière. Face aux défis du grand âge qui s'annoncent dans notre société, nous devons donc repenser un vrai parcours résidentiel, qui nécessite au préalable de conduire le grand débat sur le grand âge. Le mal-logement du grand âge constitue également une forme de maltraitance à laquelle nous devons mettre fin.
J'ai aussi été alerté par Mme la maire de Tourcoing et son adjointe sur les difficultés rencontrées par les bailleurs sociaux et les constructeurs face à la flambée des prix des matières premières. La première réponse qu'ils ont apportée est la signature d'une charte d'engagement de bonnes pratiques avec la Fédération française du bâtiment, afin de pouvoir remplir des objectifs de construction. Voilà une bonne initiative prise au niveau local, qui permet de contrecarrer le discours de pleureuses entendu tout à l'heure.
La vacance des logements pour de nombreuses raisons constitue une autre difficulté. Ainsi, 800 logements restent à l'abandon à Tourcoing, alors que le foncier disponible est de plus en plus rare et la demande de logements toujours croissante. Que pouvons-nous faire pour résoudre ce problème que rencontre Tourcoing comme de nombreuses communes ?
J'aimerais également revenir sur les difficultés rencontrées par les locataires habitant des logements insalubres. Certains se trouvent démunis face à des bailleurs parfois indifférents qui ne rempliraient pas leurs devoirs. Les procédures sont méconnues. Aussi, madame la ministre déléguée, pouvez-vous nous rappeler la procédure de médiation à laquelle ces locataires peuvent avoir recours ?
Enfin, vous m'en voudriez si je ne le faisais pas, j'aimerais terminer mon intervention en ayant une pensée pour les victimes des catastrophes naturelles qui se retrouvent dans une situation de précarité, mal logées en raison de dommages matériels. Nous devrons mieux accompagner ces sinistrés qui seront de plus en plus nombreux en raison du dérèglement climatique. Cet accompagnement passe par une meilleure prévention en amont et une meilleure indemnisation en aval. Le 15 février, la Cour des comptes doit remettre un rapport sur les catastrophes naturelles liées au retrait-gonflement d'argile, à la demande du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale. Je suis corapporteur d'une mission informelle visant à réviser les règles de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Je ne manquerai pas de revenir vers vous, madame la ministre déléguée, pour faire bouger les lignes avant la fin de cette législature et préparer l'avenir.
Ne nous privons pas de citer l'abbé Pierre qui disait : « Il ne faut pas attendre d'être parfait pour commencer quelque chose de bien ».