Je suis très heureuse d'être parmi vous ce soir pour aborder un sujet aussi important que l'avenir de ce beau département qu'est la Seine-Saint-Denis. C'est un département dynamique, jeune et plein de ressources trop longtemps inexploitées – j'allais même dire qu'elles ont été inexploitées depuis plusieurs décennies. Aux grands discours, nous préférons une ambition nouvelle. Depuis près de cinq ans, nous avons traduit cette ambition du Président de la République en mesures concrètes, à la hauteur des enjeux et des attentes légitimes de ce territoire.
Les travaux parlementaires issus du rapport des députés Rodrigue Kokouendo et François Cornut-Gentille ont permis d'adapter la réponse gouvernementale. Le travail interministériel relatif au plan d'action de dix ans mené par l'État en Seine-Saint-Denis s'inscrit dans la poursuite des engagements pris par le Président de la République le 22 mai 2018 concernant les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Cette continuité témoigne de notre engagement politique en faveur de ces quartiers, de ce département et de ses habitants, puisque ce sont autant d'actions qui ont été menées et renforcées pour remettre ces territoires au cœur du pacte républicain. À travers le comité interministériel des villes (CIV) qui s'est tenu le 29 janvier dernier durant la crise sanitaire, nous avons tenu à aller plus loin pour garantir l'attractivité des quartiers et l'émancipation de chaque habitant qui y vit.
Pour rendre la Seine-Saint-Denis attractive, nous devons améliorer le cadre de vie de ses habitants, ce qui passe évidemment par des services publics en nombre suffisant et des fonctionnaires expérimentés. Le Président de la République a annoncé, le 25 avril 2019, le déploiement d'un réseau de services publics polyvalents, les maisons France Services. La Seine-Saint-Denis comptabilise à ce jour quinze de ces espaces – dont trois itinérants –, situés notamment à Noisy-le-Grand, à Sevran, à Saint-Denis, à Bagnolet ou encore à Saint-Ouen. En outre, afin de fidéliser les agents des services déconcentrés de l'État, une prime spécifique de 10 000 euros versés après cinq ans de service révolus a été instaurée pour faire de ce territoire une étape attractive de leurs parcours professionnels.
Un État plus fort doit répondre aux enjeux sanitaires d'accès aux soins. C'est pourquoi le plan prévoit de soutenir l'investissement dans l'aménagement des hôpitaux et l'installation d'équipements lourds, comme le projet hospitalo-universitaire Grand Paris Nord, la modernisation des urgences hospitalières afin d'améliorer l'accueil des patients d'ici à 2024 et le projet de groupement hospitalier de territoire (GHT) Grand Paris Nord-Est. Pour renforcer l'attractivité du département, notamment à travers son maillage médical, nous avons instauré une aide à l'installation des structures d'exercice collectif, dont douze maisons de santé pluriprofessionnelles ont pu bénéficier. Une mission d'appui aux centres de santé municipaux a également été lancée pour les rendre plus accessibles et plus efficients.
À cet enjeu d'attractivité s'ajoute celui de la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé, qui a fait l'objet de nombreuses mesures en 2020 et 2021, à commencer par l'engagement de 10 millions d'euros dédiés au déploiement des permanences d'accès aux soins de santé (PASS) – dont chacun sait qu'elles bénéficient aux publics les plus précaires – au sein des établissements hospitaliers.
S'engager à améliorer l'attractivité de la Seine-Saint-Denis, c'est aussi garantir la sécurité et la tranquillité de ses habitants. Le ministère de l'intérieur s'est engagé à augmenter significativement, durant le quinquennat, le nombre de policiers présents dans l'ensemble du département, comme d'ailleurs dans l'ensemble du pays – je rappelle que l'objectif national consiste à créer 10 000 postes de police et de gendarmerie supplémentaires. Dans ce cadre, la Seine-Saint-Denis a bénéficié du renfort de 337 policiers du corps d'encadrement et d'application. Depuis l'arrivée de Gérald Darmanin au ministère de l'intérieur, deux quartiers de reconquête républicaine ont vu le jour dans le département, à Saint-Ouen et à La Courneuve, pour renforcer les équipes en place : soixante et onze postes de fonctionnaires ont ainsi été créés. Alors que le plan prévoyait également l'affectation de 100 officiers de police judiciaire (OPJ) supplémentaires en 2020 et 2021, ce sont finalement 133 OPJ qui renforceront les effectifs grâce à l'action du ministre : l'objectif a donc été largement dépassé.
En même temps, parce qu'il faut assécher ce qui peut constituer un vivier de recrutement des trafiquants en tous genres et des séparatistes, nous menons une action déterminée en faveur de la prévention spécialisée – compétence qui, je le rappelle, relève des départements et non de l'État, même si ce dernier les a soutenus. La Seine-Saint-Denis ne fut d'ailleurs pas en reste, puisque, sur les 600 éducateurs et médiateurs formés à la prévention spécialisée, 72 le furent dans ce département. Les bataillons de la prévention ainsi constitués ont commencé à être déployés dans cinq communes.
Parce que le pendant d'une sécurité assurée est une justice renforcée, nous agissons également pour une justice plus présente et efficace, en y consacrant les moyens financiers nécessaires. Le projet d'extension du tribunal judiciaire de Bobigny avance : il sera prêt pour 2025, comme s'y est engagé le Premier ministre. L'objectif consistant à créer trente-cinq postes de greffiers – ce qui représente une augmentation de 15 % des effectifs – et à pérenniser douze postes de magistrats supplémentaires dans les juridictions du département a également été tenu.
Enfin, pour conclure sur la question de l'attractivité – s'agissant du moins du plan L'État plus fort en Seine-Saint-Denis, car la liste est loin d'être exhaustive –, nous avons considérablement augmenté les moyens dédiés à la rénovation urbaine. Sur les 12 milliards du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), 2 milliards d'euros ont ainsi été alloués à la Seine-Saint-Denis. Nous avons aussi renforcé la lutte contre l'habitat indigne, en recrutant cinq inspecteurs de salubrité supplémentaires et en nommant, en 2020, une sous-préfète spécifiquement chargée de cette question. Nous avons évidemment l'humilité de reconnaître que la question de l'habitat indigne dans le département n'est pas réglée pour autant, mais nous avons au moins commencé à engager des moyens assez significatifs pour inverser la dynamique et redonner de la dignité à ses habitants.
Le deuxième point que je souhaite évoquer concerne l'émancipation. Chacun ici, je le crois, s'accordera à dire qu'elle passe par deux leviers : l'éducation et l'emploi.
Nous sommes d'abord convaincus que la réussite éducative des enfants et des jeunes constitue un pilier très fort de la politique d'émancipation. Là encore, nous agissons pour que la promesse républicaine soit tenue, grâce à une offre éducative de qualité – absolument nécessaire dans les territoires en difficulté – tenant compte des spécificités territoriales. C'est pourquoi, en Seine-Saint-Denis, toutes les classes de CP et de CE1 en REP ou REP+, ainsi que toutes les classes de grande section de maternelle situées en REP+, ont été dédoublées. Cette mesure concerne plus de 30 000 enfants du département. Parmi les professeurs que nous avons interrogés sur cette mesure, 82 % ont relevé une meilleure dynamique dans la classe et souligné l'amélioration des conditions d'apprentissage. Chacun d'entre vous, je le crois, a eu l'occasion de le constater dans sa circonscription, comme j'ai pu le faire au cours des visites ministérielles que j'ai effectuées.
L'ambition éducative s'incarne aussi dans les Cités éducatives – Sylvie Charrière connaît très bien ce projet, qu'elle a contribué à mettre en œuvre. Ce dispositif, mené conjointement par les ministères chargés de la ville et de l'éducation nationale, consiste à accompagner chaque enfant dans son parcours éducatif, depuis la petite enfance jusqu'à l'insertion professionnelle, selon une méthode de travail associant l'ensemble des acteurs d'un territoire – l'éducation nationale, les associations, l'État – pour réfléchir à un vrai projet éducatif de territoire, identifier les besoins et proposer des solutions. Il est très largement plébiscité par les acteurs concernés, notamment par les élus locaux, puisque neuf Cités éducatives sont déjà labellisées en Seine-Saint-Denis, ce qui représente un budget de 4 millions d'euros par an pour le ministère de la ville. S'y ajoutent, depuis samedi dernier, celles de Bobigny, Romainville et Saint-Ouen, labellisées dans le cadre de la troisième vague d'extension du dispositif, qui compte désormais 200 Cités éducatives dans toute la France.
L'autre fer de lance de notre action concerne l'emploi, dont nous avons fait une priorité de la relance. Parce qu'il est inconcevable que le lieu de résidence empêche une personne de trouver un emploi, nous avons renforcé, dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution », le dispositif des emplois francs, afin d'apporter une réponse à la crise et de permettre aux jeunes des quartiers de bénéficier de la reprise. En 2021, 35 000 jeunes ont été accompagnés dans le cadre de ce plan et 133 millions d'euros ont été engagés. La seule garantie jeunes, gérée par les quatorze missions locales du département, a quant à elle bénéficié à un peu moins de 3 600 jeunes. Durant cette même année, 1 653 emplois francs ont enfin été créés – autant de jeunes embauchés à travers les dispositifs que nous avons créés.
Nous avons par ailleurs quasiment doublé le nombre de contrats d'apprentissage durant les deux années écoulées et labellisé quatre établissements publics territoriaux de Seine-Saint-Denis comme Cités de l'emploi. Ces dernières bénéficieront chacune de l'enveloppe de 100 000 euros destinée à créer une alliance entre tous les acteurs de terrain – collectivités, opérateurs de l'État, missions locales, associations, acteurs économiques – pour identifier les publics les plus éloignés de l'emploi et leur proposer des solutions. Cette labellisation a été créée en 2021 : sa mise en œuvre est en cours et elle entrera en phase opérationnelle dès 2022.
Il importe évidemment d'être à l'écoute des territoires – en tant que ministre déléguée chargée de la ville, j'en suis convaincue, comme vous l'êtes vous-mêmes. C'est ce que nous avons fait en recentralisant le financement du RSA. Nous sommes plusieurs à avoir assisté à la signature de la convention qui liera le Gouvernement et la Seine-Saint-Denis pendant la durée de l'expérimentation. Dès 2022, le département pourra dégager par an 40 millions d'euros de marge de manœuvre financière pour œuvrer en faveur de l'emploi et aider notamment les publics en insertion ou en réinsertion professionnelle. Encore une fois, l'État est engagé très fortement, aux côtés des collectivités, pour encourager cette dynamique de l'emploi.
Je tiens donc à réaffirmer l'engagement du Gouvernement en faveur de la Seine-Saint-Denis. Ce département compte trente-trois QPV sur trente-six quartiers : c'est dire combien il est concerné par la politique de la ville ! Plus globalement, le plan L'État plus fort en Seine-Saint-Denis est à la fois une vision, ou un cap – permettre à chaque citoyen de prendre sa place dans la République – et une méthode, consistant à coproduire avec les acteurs locaux grâce à une mobilisation interministérielle. Il doit également déboucher sur des résultats, puisqu'il a vocation à avoir une incidence réelle et positive sur le quotidien des habitants des quartiers. Ce plan, qui date de 2019, a connu deux pleines années d'application. Si certains résultats sont concluants, nous devons continuer à travailler dans certains domaines : nous avons l'humilité de reconnaître que la tâche est grande, voire immense. Toutefois, la détermination est là : tous les ministères concernés sont mobilisés, aux côtés des élus locaux, pour répondre aux attentes très fortes des habitants de Seine-Saint-Denis. Nous le leur devons.