Intervention de Jean-Hugues Ratenon

Séance en hémicycle du mardi 1er février 2022 à 15h00
Influence de la diplomatie française

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Hugues Ratenon :

Il y a quelques semaines, le ministre des affaires étrangères a présenté une feuille de route censée être la « première doctrine consolidée » en la matière, née de l'« urgence à repenser […] notre diplomatie culturelle et d'influence » – une urgence telle qu'il aura fallu attendre la fin du quinquennat.

Cette question du calendrier n'est pas neutre, car ce document est à certains égards moins une doctrine qu'un bilan idéalisé du quinquennat d'Emmanuel Macron. On serait bien en peine d'y trouver une direction claire. Certes, la notion d'influence dans le domaine des relations internationales est elle-même difficile à cerner. Elle renvoie généralement à la capacité à faire triompher ses vues par des outils alternatifs, non coercitifs, ne relevant pas des attributs de la puissance telle qu'elle est habituellement définie.

On ne dissertera pas ici de l'opposition très artificielle opérée entre hard power et soft power. Selon nous, la question de l'influence et de la puissance supporte mal la séparation canonique entre ce qui relève de l'action dite extérieure et ce qui relève de la politique dite intérieure.

Au début de la pandémie, il est apparu aux yeux du monde que des décennies de néolibéralisme destructeur nous avaient rendus dépendants des importations pour 80 % de nos médicaments et dispositifs médicaux comme les masques. La responsabilité de cette réalité, désastreuse pour notre image, est-elle à chercher du côté de notre diplomatie d'influence ou de décisions prises ailleurs qu'au ministère des affaires étrangères ? Quant à la prétention du Gouvernement à œuvrer pour le climat, qu'en penser alors que la France a été attaquée pour son inaction climatique ? Et que dire quand ce même gouvernement affirme contribuer à la diffusion des droits humains et de la liberté alors que l'État français a été pointé du doigt par l'ONU du fait de la répression qu'il a organisée contre les gilets jaunes ? Que dire encore quand il appelle à préserver les biens communs tout en s'abritant derrière l'Union européenne pour bloquer la levée des brevets sur les vaccins à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ?

Mais revenons-en à la feuille de route stricto sensu. Pour nous, l'influence repose sur trois éléments : elle suppose de déployer des moyens ; elle dépend de la capacité à parler de sa propre voix ; elle est inséparable de l'image que renvoie la France aux autres peuples.

S'agissant des moyens, nous voyons bien que le bilan dressé dans la feuille de route s'apparente à un miracle, eu égard au sort réservé depuis trente ans au ministère des affaires étrangères : des effectifs diminués de 53 %, des biens immobiliers essentiels à la représentation de la France vendus à l'encan ! Les régions les plus sévèrement touchées ont été l'Afrique et l'océan Indien. Le ministre Le Drian s'est vanté d'avoir stoppé l'hémorragie : c'est oublier que le budget pour 2022 n'atteint même pas le niveau de celui de 2017.

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