Quels que soient nos désaccords sur les orientations de l'action extérieure de la France, nous nous retrouverons certainement pour dire qu'une politique d'influence implique d'avoir les moyens humains et matériels nécessaires. Comme je l'ai déjà observé, le bilan de l'influence française dressé par la feuille de route est miraculeux, sachant que les effectifs du ministère des affaires étrangères ont subi une coupe de 53 % en trente ans, et que son budget pour 2022 n'atteint même pas celui de 2017.
Vous dites avoir mis fin à l'hémorragie, monsieur le ministre, mais vous n'avez pas su bloquer la destruction programmée du savoir-faire diplomatique qu'implique la réforme voulue par Emmanuel Macron, au prétexte d'ouvrir la haute fonction publique. Cette réforme prévoit la disparition du corps diplomatique. Pour la justifier, on ressort, ici ou là, les images d'Épinal d'une diplomatie prisonnière de vieilles habitudes sclérosées. C'est ignorer qu'en raison même de la multiplicité de ses missions, le Quai d'Orsay est l'une des administrations les plus diversifiées : 52 % de ses agents et 20 % de son encadrement ne sont pas membres du corps diplomatique. L'ouverture prônée est déjà une réalité.
Bien sûr, il reste des progrès à accomplir. À l'image de toute la haute fonction publique, le recrutement des diplomates manque de diversité sociologique, mais la suppression du corps diplomatique n'améliorera en rien la situation. Les diplomates déplorent une réforme précipitée, qui fait fi des qualités requises pour réussir les concours spécifiques au ministère des affaires étrangères : l'excellence linguistique et la connaissance profonde de certaines zones géographiques. La réforme risque de détruire le métier de diplomate, fruit d'une longue histoire et d'un savoir-faire toujours renouvelé. Comptez-vous convaincre vos collègues du Gouvernement et le Président de la République d'arrêter cette réforme avant qu'il ne soit trop tard ? C'est en tout cas ce que nous ferions si nous arrivions au pouvoir.