On ne peut que regretter, madame la ministre, que lorsque deux lycées professionnels d'un même département proposent des cursus identiques, l'arbitrage conduise souvent à privilégier la filière du lycée qui se situe dans une grande ville. Je connais plusieurs exemples où une filière du lycée professionnel de Remiremont a été sacrifiée au profit d'exactement la même filière proposée dans la ville préfecture. Ce n'est pas un excellent signal qu'on envoie là aux territoires ruraux.
Les chiffres de l'apprentissage sont très encourageants mais il faut aussi penser au coût de ces aides. Il convient certes de voir le côté positif : quand on embauche un apprenti aujourd'hui, et c'est le chef d'entreprise qui vous parle, on a la chance que cela ne coûte rien à l'entreprise. C'est à saluer. Il faut aussi, en responsabilité, penser à la pérennité de ces chiffres de recrutement, à la soutenabilité financière à long terme. Comment pourrons-nous assurer une sortie progressive du dispositif d'aides exceptionnelles sans menacer cette dynamique d'embauche des apprentis ?
La situation financière de France compétences est alarmante, elle reste largement déficitaire : environ 7 milliards d'euros cumulés sur deux ans pour un abondement budgétaire de 2,7 milliards. Ce déficit s'explique par la crise sanitaire, bien sûr, mais également par le boom de l'alternance et une utilisation croissante et record du CPF. Créer des politiques publiques ambitieuses est une chose, et même une bonne chose, mais les appliquer sans prévoir leur financement en est une autre. Il me semble indispensable de doter ces mesures de moyens financiers cohérents, à la hauteur des budgets qu'elles appellent.
Je souhaite également aborder la question du coût-contrat, soit le financement des centres de formation proportionnellement au nombre d'apprentis formés. Ce coût-contrat, malheureusement, ne prend pas en charge l'ensemble des dépenses des CFA comme les dépenses d'investissement non liées à des activités pédagogiques, qui sont pourtant indispensables pour ces structures et pour leur développement. Les intégrer permettrait d'assurer la viabilité des petits CFA dont la survie pourrait être menacée dans les années à venir. Ces CFA sont primordiaux pour les territoires ruraux.
Enfin, cette loi a modifié le partage et l'attribution des compétences, notamment financières, en plaçant les branches et les entreprises au centre du dispositif, parfois au détriment des régions. Nous avons largement eu l'occasion d'en discuter dans cet hémicycle. Le rôle des régions est incontestable puisqu'elles sont les plus à même d'identifier les besoins de leurs territoires. Il faut que l'État et les régions continuent de travailler en bonne intelligence afin d'assurer la cohérence territoriale.