Je me réjouis que le débat puisse avoir lieu sur la question très sensible du foncier en Corse et me félicite que la proposition de loi dont nous entamons la discussion ait rencontré auprès de la quasi-totalité des groupes politiques un accueil très favorable. Je salue aussi l'important travail collectif de fond déjà engagé.
Ce texte est particulièrement attendu et espéré car la Corse est en proie à un phénomène de spéculations immobilière et foncière qui met en péril la possibilité pour ses habitants, notamment les plus jeunes et les familles aux revenus médians, de s'y loger décemment, d'y vivre paisiblement et de s'y projeter durablement.
Je ne citerai que quelques chiffres : le taux de résidences secondaires en Corse, de près de 30 %, est trois fois supérieur à la moyenne française ; certaines villas, proches du littoral, peuvent se vendre jusqu'à 30 000 euros le mètre carré et se louent facilement 10 000 ou 20 000 euros la semaine, parfois bien plus, en haute saison. Quand on sait que le revenu médian annuel en Corse, inférieur de 18 % à la moyenne nationale, avoisine les 20 000 euros, on mesure l'indécence de ces transactions qui aggravent les inégalités au sein de la société insulaire.
En raison du déséquilibre entre l'offre et la demande de logements induit par cette situation et de la dynamique des prix à la hausse qu'elle entretient, le coût des terrains à bâtir, qui a un impact sur le coût des résidences principales, a connu une inflation trois fois supérieure à la moyenne française. Ainsi, le droit au logement est, dans les faits, largement remis en cause. Le prix des terrains n'est pas de nature à encourager la construction de logements sociaux et dans plusieurs zones, en particulier près du littoral, là où se trouvent les emplois, une grande partie des ménages ne peut accéder à la propriété pour des raisons financières. La dynamique exponentielle à l'œuvre est mortifère et pousse dos au mur la majorité des habitants qui ont choisi d'avoir un projet de vie toute l'année en Corse.
Enfin, la hausse des impôts de succession, entretenue par la valeur spéculative des transactions, entraînera une dépossession massive des insulaires, surtout dans le contexte de désordre foncier non encore résolu que connaît la Corse. Des milliers de familles modestes, qui régularisent leurs successions afin de reconstituer les titres de propriété sur des biens dont le dernier propriétaire connu est très souvent décédé avant 1900,…