Intervention de Philippe Chassaing

Séance en hémicycle du vendredi 4 février 2022 à 15h00
Lutte contre l'exclusion financière et plafonnement des frais bancaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Chassaing :

En préambule, permettez-moi de revenir sur la politique d'inclusion bancaire qui a été mise en œuvre depuis le début de la législature. En septembre et en décembre 2018, sous l'impulsion du Président de la République et du ministre de l'économie, il a été demandé aux banques d'instaurer un plafond des frais bancaires pour les personnes reconnues en situation de fragilité financière ; il s'élève à 20 euros par mois pour les détenteurs de l'offre spécifique, et à 25 euros pour les autres. Puis, en février 2020, afin d'homogénéiser les critères de détection de la fragilité financière, le ministre de l'économie a demandé aux banques de publier les critères auxquels elles avaient recours. Le 20 juillet 2020, un décret a précisé les modalités d'entrée dans la catégorie dite de fragilité financière où l'on trouve par exemple le critère des « cinq irrégularités ou incidents au cours d'un même mois ».

Dans le sillage de ce décret, la charte de l'AFECEI – l'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement –, qui recense les engagements des banques en matière de protection de la clientèle fragile, a fait l'objet d'une réécriture en septembre 2020 afin d'intégrer les nouveaux engagements pris. Je précise que le respect de cette charte donne lieu chaque année à un contrôle par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).

Je conclurai ce bilan en évoquant deux amendements que j'ai défendus au cours du dernier projet de loi de finances et qui, avec l'aval du Gouvernement, permettront d'étoffer le volet préventif de notre politique d'inclusion bancaire. Le premier consiste en une expérimentation au sein des points conseil budget afin de détecter plus vite les personnes potentiellement en fragilité grâce à la mobilisation des banques et d'autres acteurs de la sphère économique et sociale. Le second vise à abonder le Fonds de cohésion sociale, qui garantit l'octroi du microcrédit, avec l'objectif d'en accroître la diffusion.

En somme, tout au long de la législature, nous avons cherché à mieux protéger les plus fragiles et à renforcer leur accompagnement. Ces avancées ont été faites en concertation avec les banques qui, pour certaines, ont compris l'enjeu de protéger les plus modestes.

J'en viens aux points principaux de la proposition de loi. Je note tout d'abord que vous souhaitez passer par la loi pour définir la fragilité financière et changer la méthode qui a prévalu jusqu'à maintenant. Reconnaissons pourtant que la contractualisation avec les banques offre une certaine souplesse, permettant de revenir sur le sujet à de multiples reprises et de procéder rapidement à des modifications, comme dans le décret du 20 juillet 2020 – en pleine pandémie, alors que la situation sanitaire et économique d'un certain nombre de nos concitoyens exigeait que des mesures soient prises rapidement ; la loi n'aurait sans doute pas permis d'aller aussi vite.

Je note également que votre proposition ne se limite pas à la protection des clients les plus fragiles. Vous proposez en effet de baisser le plafond des frais d'incidents et opérations bancaires pour l'ensemble des ménages, prenant ainsi acte de l'inefficacité du marché bancaire concurrentiel. Je ne suis pas convaincu que la baisse du plafond soit de nature à rendre du pouvoir d'achat aux ménages, car rien n'empêchera les banques – vous le reconnaissez vous-même dans l'exposé des motifs du texte – de compenser cette baisse par la hausse d'autres frais ; c'est la pratique dite de tarification croisée.

En ce qui concerne la protection bancaire des personnes les plus exposées à la fragilité, vous proposez de mettre en œuvre un plafonnement global pour l'ensemble des opérations. Je crains que cette proposition, élaborée sans consultation préalable des banques, les conduise en fait à renoncer à effectuer ces opérations pour le compte de leurs clients.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.