Intervention de Claudia Rouaux

Séance en hémicycle du vendredi 4 février 2022 à 15h00
Lutte contre l'exclusion financière et plafonnement des frais bancaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaudia Rouaux :

La lutte contre l'exclusion financière et le plafonnement des frais bancaires est un objectif partagé par le groupe Socialistes et apparentés. Mieux protéger les personnes en difficulté ou fragilité financière est un impératif moral.

Selon le rapport public annuel 2021 de la Cour des comptes, 3,4 millions de personnes bénéficiaient du dispositif de plafonnement des frais d'incidents à la fin de l'année 2019, tandis que 512 000 de nos concitoyens avaient souscrit à l'offre spécifique.

Cette réalité sociale s'inscrit dans un contexte marqué par les conséquences de la crise sanitaire ainsi que par une poussée inflationniste. À juste titre, le pouvoir d'achat constitue l'une des priorités des Français. D'après les données publiées le 1er février 2022 par l'INSEE, les prix à la consommation ont augmenté de 2,9 % en France entre janvier 2021 et janvier 2022.

L'inflation n'épargne pas les frais bancaires. Selon l'Observatoire des tarifs bancaires, les frais de tenue de compte ont explosé de 167 % depuis 2012. Selon Panorabanques, un comparateur de banques en ligne, les frais pour retraits réalisés hors du réseau d'agences de sa propre banque augmenteront en moyenne de 39 % cette année, alors que le mouvement de réduction du nombre d'agences et de distributeurs se poursuit, ce qui fait peser un risque de désertification bancaire.

Pour garantir l'inclusion bancaire et protéger les clients les plus fragiles, il faut souligner les progrès qu'ont constitué la mise en place du droit au compte en 1984 ou encore le plafonnement des commissions d'intervention en cas de dépassement du découvert autorisé grâce à la loi de séparation et de régulation des activités bancaires de 2013.

Il faut toutefois aller plus loin. C'est le sens de cette proposition de loi qui comprend plusieurs avancées. Elle prévoit la baisse d'une partie des commissions d'intervention, à l'article 1er ; celle des frais bancaires applicables au rejet d'un chèque sans provision et aux autres incidents de paiement, à l'article 2 ; elle introduit des plafonds, notamment en faveur des personnes en situation de fragilité financière. Il est cependant regrettable que n'aient pas été inclus les agios ou d'autres coûts tels que les frais pour dépassement du nombre de retraits autorisés ou les frais de tenue de compte.

Harmoniser la définition de la notion de fragilité financière est nécessaire pour renforcer l'égalité de traitement. La flexibilité actuellement laissée aux établissements bancaires pour identifier les clients dans cette situation n'est pas une bonne méthode pour garantir cette égalité entre les bénéficiaires potentiels. En étant plus restrictives sur ces critères, certaines banques peuvent pousser vers la sortie des clients fragiles – j'y reviendrai au sujet de La Poste.

Ce texte vise à améliorer la procédure du droit au compte, en particulier pour les personnes victimes de violences conjugales. Aujourd'hui, le délai moyen d'ouverture d'un compte est de plus de dix jours, ce qui est trop long dans des situations d'urgence.

Cependant, nous n'approuvons pas ce que prévoit actuellement le texte : pour bénéficier du droit au compte individuel, les victimes auraient à justifier de leur statut de victime de violence conjugale. Le droit au compte doit être personnel. En outre, afin de protéger les victimes, les démarches de transformation d'un compte joint en compte indivis devraient être simplifiées, tout en limitant les frais applicables.

Pour compléter ces avancées, notre groupe vous propose deux amendements. Le premier, à l'initiative de Christine Pires Beaune, vise à encadrer les frais bancaires sur les successions, afin qu'ils soient calculés en fonction des coûts réels supportés par les banques. Une étude récente d'UFC-Que choisir estime à 150 millions d'euros par an les revenus procurés par ces frais, variant du simple au quadruple selon les établissements, qui facturent souvent des montants forfaitaires pénalisant les plus petites successions.

Le second, à l'initiative de mon collègue Jean-Louis Bricout, vise à demander un rapport sur les obligations des banques à l'égard des publics fragiles. Le groupe La Poste, qui assume ces missions, dont celle d'accessibilité bancaire à titre exclusif, avec une compensation insuffisante de la part de l'État nous a alertés à ce sujet.

Le groupe Socialistes et apparentés votera pour ce texte de nature à renforcer l'inclusion bancaire et la protection des personnes les plus fragiles.

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