Je pense à un événement qui lui a lieu il y a exactement cinquante ans, lorsqu'en septembre 1958, le général de Gaulle reçoit Konrad Adenauer à la Boisserie. La conversation qu'ils ont eue, la nuit du 14 au 15 septembre, restera secrète, mais c'est à ce moment que ces deux héros ayant lutté contre le nazisme vont dépasser tout le poids de l'histoire pour ouvrir l'avenir.
Nous sommes héritiers de cette histoire-là ; héritiers, nous devons être pionniers, pionniers de nouvelles frontières. Il nous faut réenchanter le récit européen, qui est le même que le récit de la République. Pour raffermir ce qui relie nos nations, nous devons retrouver le souffle du discours de Ludwigsburg du général de Gaulle s'adressant à la jeunesse allemande : il ne leur parle pas des liens franco-allemands, il leur dit de regarder ensemble vers l'Afrique, cette Afrique qui a faim.
Nous devons aujourd'hui dire à la jeunesse du monde de regarder du côté du changement climatique, de toutes les paysanneries du Sud qu'il faut nourrir, de la Méditerranée qui doit être une nouvelle frontière ; non un mur, non un cimetière, mais une passerelle. Voici l'horizon du traité que nous devons bâtir : une nouvelle frontière pour l'humanisme, qui est la forme moderne du courage, et dont nous sommes les derniers héritiers en Occident.