Intervention de Alexandra Louis

Séance en hémicycle du mardi 8 février 2022 à 21h30
Protection des lanceurs d'alerte - rôle du défenseur des droits en matière de signalement d'alerte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexandra Louis :

Parce qu'ils font partie des vigies de la démocratie, les lanceurs d'alerte méritent toute notre attention et, surtout, une protection efficace. C'est donc l'honneur de notre Parlement d'être parvenu à un accord en commission mixte paritaire après des travaux parlementaires et des débats constructifs. Comme cela a été rappelé, il s'agit d'une loi ordinaire et d'une loi organique visant à renforcer la protection des lanceurs d'alerte et à renforcer le rôle du Défenseur des droits en matière de signalement.

Nous saluons le travail de notre rapporteur Sylvain Waserman qui, dans le cadre de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, en 2019, avait déjà fait adopter une recommandation allant dans le sens des textes que nous étudions aujourd'hui. J'ai l'honneur, avec le président de mon groupe, Olivier Becht, et mon collègue Dimitri Houbron, d'être moi aussi membre de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, où nous travaillons depuis trois ans sur ce sujet, preuve de la vitalité et de l'importance de ces institutions européennes.

Le groupe Agir ensemble soutient avec force les deux textes présentés aujourd'hui, qu'il a cosignés avec les autres groupes de la majorité. Plus que jamais, les lanceurs d'alerte jouent un rôle décisif dans toute démocratie ouverte et démocratique. Comme nous l'a encore récemment prouvé l'actualité avec l'affaire Orpea et la publication du livre Les Fossoyeurs par le journaliste Victor Castanet, les lanceurs d'alerte mettent au jour les dysfonctionnements de notre société. Il est donc primordial que les pouvoirs publics garantissent leur sécurité face aux risques tant personnels que professionnels qu'ils prennent par leurs révélations.

La reconnaissance qui leur est accordée et l'efficacité de leur protection juridique contre toutes sortes de représailles constituent un véritable marqueur démocratique. Si la loi Sapin 2 avait fait de la France l'un des pays les mieux équipés légalement pour prévenir la corruption et protéger ses lanceurs d'alerte, ce texte vient transposer une directive européenne importante qui perfectionne encore notre arsenal juridique.

Sur certains points, cette proposition de loi va même plus loin que ce qu'exige la directive en termes de protection. Par exemple, les facilitateurs seront protégés, qu'ils soient personne morale ou personne physique, alors que la directive ne demandait que la protection des facilitateurs personnes physiques. Ainsi, un syndicat ou une association aidant un lanceur d'alerte pourront être protégés.

La proposition de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte est audacieuse et ambitieuse. Elle est, somme toute, à la hauteur de ce qu'une grande démocratie comme la France se doit de mettre en place. Par exemple, l'article 5 permettra de renforcer la protection des lanceurs d'alerte contre les représailles et les procédures bâillons. Cela m'évoque une scène du magnifique film La Fille de Brest, consacré à l'affaire du Médiator : on y voit Irène Frachon demander à son avocat de modifier son contrat de mariage pour éviter qu'en cas de représailles des laboratoires Servier son mari et sa famille soient financièrement affectés.

Avec l'article 2 de cette proposition de loi, qui accorde une protection forte aux facilitateurs qui ont aidé les lanceurs d'alerte, le « père Noël » de la CNAM – Caisse nationale de l'assurance maladie – aurait peut-être osé communiquer les informations plus rapidement. Peut-être aurions-nous pu, sous l'empire de la loi que nous allons adopter, éviter quelques centaines de morts.

Enfin, l'article 3, mettant fin à la procédure de divulgation en trois étapes prévue par la loi Sapin 2, est une avancée fondamentale de ce texte : il est, pour les lanceurs d'alerte, un gage de lisibilité, de simplicité et de pragmatisme.

J'ai défendu en séance publique, avec les membres de mon groupe Agir ensemble et ceux de la majorité, des amendements qui permettront au juge d'allouer une provision visant à couvrir les subsides de la partie dont la situation financière s'est gravement dégradée en raison du signalement.

Enfin, j'aimerais avoir un mot pour la proposition de loi organique, qui élargit les missions du Défenseur des droits, en vue de l'accompagnement des lanceurs d'alerte, les étendant aux facilitateurs et autres personnes en lien avec ces derniers.

La commission des lois du Sénat a complété la proposition de loi organique en prévoyant notamment que le Défenseur des droits soit assisté d'un adjoint spécialement chargé de l'accompagnement des lanceurs d'alerte. Je salue cet apport et voterai évidemment l'amendement du Gouvernement visant à préciser que ce poste ne sera pas exercé à titre bénévole – ce qui paraît assez évident.

Pour conclure, le groupe Agir ensemble se félicite du consensus largement transpartisan qui se dégage autour de ce texte, sur le fond comme sur la forme. Le rapport de la CMP montre à quel point les deux chambres ont su œuvrer efficacement à l'aboutissement d'un texte ambitieux, à la hauteur d'une grande démocratie telle que la nôtre. C'est avec une grande fierté que le groupe Agir ensemble le votera.

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