Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Séance en hémicycle du mardi 8 février 2022 à 21h30
Protection des lanceurs d'alerte - rôle du défenseur des droits en matière de signalement d'alerte — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

Ce texte est d'une grande qualité, et je tiens à saluer le travail réalisé par M. le rapporteur.

Toutefois, je souhaiterais vous faire part de l'immense déception qui fut la nôtre lors de l'examen de la proposition de résolution portée par le groupe Libertés et territoires, la semaine dernière. Cette proposition de résolution aurait pu permettre à la France, pays des droits de l'humain, d'être à la hauteur de son histoire. En votant l'asile politique à Julian Assange, en lui permettant de résider sur le sol français, à l'abri des représailles et de l'intimidation qu'il subit depuis plus de dix ans, notre pays se serait honoré à garantir le droit d'alerte et à protéger les hommes et les femmes victimes de répression. Nous déplorons le mauvais signal que cela envoie aux futurs lanceurs d'alerte, ici et à l'étranger.

Il apparaît en outre paradoxal d'examiner ce texte, qui est un texte ambitieux, alors que la protection des lanceurs d'alerte étrangers n'y figure pas. Il s'agit là encore d'un « en même temps » bien dommageable.

Toutefois, nous reconnaissons que cette proposition de loi transposant la directive européenne du 23 octobre 2019 est allée bien plus loin dans ses dispositions, ce qui en fait un texte très protecteur pour les lanceurs d'alerte en France.

Elle permet de reconnaître le rôle de facilitateurs joué par les associations, les syndicats ou les ONG. Ce sont des appuis cruciaux pour ces concitoyens qui ne souhaitent plus être des spectateurs mais des acteurs de notre démocratie au service de l'intérêt général. Toutefois, nous aurions souhaité qu'ils bénéficient des mêmes protections que les lanceurs d'alerte.

Par ailleurs, cette proposition de loi supprime la hiérarchisation des canaux, en mettant fin à l'obligation de dénoncer les faits délictueux en interne avant de pouvoir en référer à un canal externe de signalement. Cette disposition est la bienvenue, tant les risques de représailles étaient dangereux et l'effacement des preuves un risque d'étouffement des actes perpétrés.

De plus, un lanceur ou une lanceuse d'alerte pourra divulguer publiquement les informations qu'il ou elle possède « en cas de danger grave et imminent ». Il s'agit d'une avancée permise par la navette parlementaire dont notre groupe est particulièrement satisfait, puisque cette mesure avait été défendue par notre collègue Marie-George Buffet en première lecture.

Parce que les procédures lancées contre les lanceurs d'alerte sont parmi les premières armes utilisées pour les bâillonner, les dispositions retenues dans ce texte pour les sanctionner et dissuader leurs auteurs d'en faire usage constituent aussi de belles avancées. Assurer aux lanceurs d'alerte que toute tentative de représailles sera punie est l'une des protections les plus essentielles et les plus attendues.

Nous tenons également à saluer la garantie d'une provision financière en faveur du lanceur d'alerte pour qu'il puisse assurer sa défense, sans avoir besoin de la rembourser dans le cas où il n'obtiendrait pas gain de cause.

Enfin, il était important d'inscrire dans la loi l'absence de responsabilité pénale pour tout lanceur d'alerte « qui soustrait, détourne ou recèle les documents ou tout autre support contenant les informations dont il a eu connaissance de manière licite ». En effet, notre rôle est d'encourager et de protéger les hommes et les femmes qui agissent contre ceux qui outrepassent sciemment nos lois.

Chers collègues, les citoyens et les citoyennes de notre pays exigent davantage de transparence, d'éthique et de probité au sein de nos institutions publiques et des instances privées. Nous saluons le travail effectué sur ce texte et le groupe GDR votera évidemment pour cette proposition de loi.

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