La France devait transposer la directive européenne sur la protection des lanceurs d'alerte. Nous devions le faire avant la fin de cette législature ; c'est aujourd'hui chose faite.
Cette transposition a été l'occasion pour notre pays de renforcer notre arsenal juridique en la matière et d'améliorer le statut des lanceurs d'alerte, tel qu'il avait été pensé, élaboré et adopté par la loi Sapin 2 de 2016. Avec cette loi de 2016, il s'agissait de reconnaître le rôle des lanceurs d'alerte, de les accompagner et d'interdire les représailles à leur encontre, tout en encadrant ces révélations. La loi avait défini un véritable statut du lanceur d'alerte, comprenant des droits mais aussi des devoirs. Elle avait permis à la France de se hisser au niveau des standards les plus élevés sur la question.
En juillet dernier, nous avions conduit, avec mon collègue de l'opposition Olivier Marleix, un travail d'évaluation de l'application du dispositif. Les résultats en étaient nuancés, avec ce paradoxe que, si la loi incitait les lanceurs d'alerte à effectuer des signalements, dans les faits elle ne parvenait pas à les protéger efficacement. Les lanceurs d'alerte sont encore trop souvent victimes de représailles, et nombre d'entre eux rencontrent des difficultés financières, alors qu'ils ont sacrifié leur vie professionnelle – et parfois personnelle – à l'intérêt général. Surtout, la pratique a montré que la protection des lanceurs d'alerte est soumise à des critères exigeants, notamment le désintéressement et l'obligation de passer prioritairement par le canal interne. Les lanceurs d'alerte craignent donc de s'exposer et de ne pas bénéficier d'un soutien efficace de la part des pouvoirs publics.
Notre rapport contenait plusieurs propositions qui ont été très largement reprises par la présente proposition de loi. C'est notamment le cas pour ce qui concerne les critères de recevabilité des alertes et de désintéressement, les problèmes financiers que rencontrent les lanceurs d'alerte et – vous l'avez rappelé, madame la ministre – les procédures bâillons, terme désignant les procédures multipliées par l'entreprise, l'administration ou la personne visée par l'alerte, dans le seul but de déstabiliser le lanceur d'alerte. Ce point est extrêmement important. Lors des travaux préparatoires, nombre de personnes auditionnées nous ont alertés sur les difficultés réelles rencontrées.
Sur ce point, le texte innove. Il permet notamment au juge de prononcer une amende civile dissuasive ou de faire supporter à la partie adverse, au cours de l'instance, les coûts de procédure. Nous en avons longuement débattu lors de la première lecture. Le Sénat n'y était pas favorable – enfin pas totalement. La commission mixte paritaire a maintenu le dispositif de l'Assemblée, qui permet de donner, encore une fois, des garanties financières effectives aux lanceurs d'alerte sur ces questions.
Pour finir, le groupe La République en marche considère que la proposition de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte est sans doute une bonne illustration de ce qui doit être fait en matière de construction européenne et de la place que doivent tenir la France et, en tout premier lieu, le Parlement français, dans la construction européenne. C'est la France qui a adopté le premier statut protecteur de lanceur d'alerte en 2016 pour ensuite le défendre au niveau européen et conduire à l'adoption de la directive que nous transposons aujourd'hui.
La France l'a fait hier également en matière de protection des données personnelles, en prônant l'extension de sa législation à l'échelle européenne, ce qui a donné le règlement général sur la protection des données (RGPD). Elle le fait encore aujourd'hui en matière de lutte contre la haine sur internet. Espérons qu'elle le fera toujours demain en matière, par exemple, de lutte contre la corruption ou de lois de blocage pour protéger nos entreprises engagées dans la guerre économique mondiale. En matière de construction européenne, hier comme aujourd'hui, la France doit montrer le chemin.