Intervention de Ugo Bernalicis

Séance en hémicycle du mercredi 16 février 2022 à 15h00
Prévention de la diffusion en ligne de contenus à caractère terroriste — Article unique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaUgo Bernalicis :

Puisque le règlement européen entrera en application le 7 juin quoi qu'il arrive, pourquoi affirmez-vous que nous fragiliserons notre droit si nous ne votons pas la proposition de loi ? Cela n'a pas de sens. Que fragiliserons-nous, si le droit actuel reste en vigueur jusqu'au 7 juin, et si le règlement s'applique ensuite ? Cela ne nous placerait pas dans une quelconque contradiction. En revanche, ce nouveau droit européen pourrait entrer en contradiction avec nos textes fondamentaux et la Constitution. Je rappelle que les États peuvent déférer un règlement devant la Cour de justice de l'Union européenne : la France y procéderait si elle était à la hauteur des enjeux en matière de liberté d'expression et de libertés fondamentales.

Par ailleurs, le moyen le plus efficace de lutter contre les messages dits à caractère terroriste sur les réseaux sociaux n'est certainement pas une injonction de retrait sous une heure de l'autorité administrative, une mise en demeure du régulateur, ou que sais-je. Dans votre logique, ce n'est d'ailleurs pas l'auteur du message censuré qui est présenté devant le juge, mais les plateformes. Manifestement, vous avez fait votre choix entre les plateformes, les citoyens et leur liberté d'expression. Votre démarche présente de profondes contradictions.

Vous déclinez le règlement européen comme s'il s'agissait d'une directive, alors que rien ne vous y oblige. Ce faisant, vous poussez encore plus loin la logique, au prétexte d'établir une architecture plus précise et plus efficace ; en réalité, vous souhaitez que le rôle de filtre n'incombe pas à la CNIL mais à l'ARCOM. Dans la lignée de vos précédentes lois, vous effectuez des ajustements techniques visant une efficacité administrative maximale. Ce que nous voulons, ce n'est pas une efficacité administrative maximale, mais une garantie maximale de respect d'une liberté fondamentale : la liberté d'expression. C'est à cette condition qu'on peut ajuster les moyens administratifs en vue de supprimer des contenus discriminatoires, haineux ou à caractère terroriste.

Enfin, le règlement a beau définir clairement le terrorisme, cette définition reste soumise à une interprétation, qui est avant tout politique.

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