Je ne partage pas l'avis du procureur national antiterroriste. Les périmètres respectifs de la justice administrative et de la justice judiciaire font d'ailleurs l'objet de débats dans la magistrature. Certains estiment que les nouveaux gardiens des libertés fondamentales – et d'autres libertés – sont le juge administratif et, en dernier ressort, le Conseil d'État. Je ne le pense pas, car je reste attaché au principe affirmé dans l'article 66 de la Constitution, selon lequel l'autorité judiciaire – et non l'autorité administrative – est gardienne des libertés individuelles et fondamentales. Chaque fois que votre gouvernement, comme les précédents, a instauré des procédures administratives au détriment de l'autorité judiciaire, il a rehaussé le piédestal du juge administratif, censé être le garant d'un certain nombre de libertés. C'est une anomalie, car, même si toutes deux font bien leur travail, les justices administrative et judiciaire ne bénéficient pas des mêmes garanties statutaires – je parle en tout cas pour le siège, mais la situation est différente pour le parquet ; or c'est un représentant du parquet que vous avez interrogé.
Si vous aviez privilégié la procédure judiciaire, vous auriez donné le maximum de garanties. Imaginons que la compétence ait été confiée à l'autorité judiciaire : le procureur national antiterroriste n'y aurait probablement vu aucun problème ! Il vous a répondu qu'il n'était pas problématique de la confier à la justice administrative, mais il ne verrait certainement aucune difficulté – sinon un manque de moyens – à ce que la compétence relève de l'autorité judiciaire.