Sur ces questions, nous avons deux points d'accord.
Premièrement, il y a toujours eu dans le monde agricole un lien indéfectible entre le mouvement mutualiste, coopératif, les solidarités en général, et la prospérité. La prospérité agricole s'est bâtie sur des régulations et sur des mécanismes de partage. C'est toute l'histoire agricole du monde, et c'est l'histoire de l'agriculture française. Nous nous inscrivons dans la continuité de ce mouvement.
Deuxièmement, nous sommes d'accord pour dire que le statu quo n'était tout simplement pas acceptable. Aujourd'hui, 18 % seulement des surfaces sont assurées, 1 % dans une culture aussi stratégique que l'arboriculture, 33 % dans la viticulture et les grandes cultures : on est loin du compte. Certains secteurs sont totalement orphelins face à des calamités qui elles-mêmes sont en progression. Ce système fatigué laisse des exploitants et des cultures sans protection face à un danger de plus en plus récurrent lié au changement climatique et à l'intensification des phénomènes tant de sécheresse que de pluviométrie – l'épisode de gel de cet été nous en a rappelé le caractère tragique. Il fallait donc le réformer.
Nous restons humbles puisque pendant les cinq années de la législature précédente, nous n'avions pas engagé de réformes sur ce sujet alors que la question se posait déjà. Nous avons rappelé qu'il y avait d'autres perspectives. Pour ma part, j'étais très favorable à un système public d'économie sociale sous la forme d'une contribution volontaire obligatoire. Nous avons, dans un amendement, proposé une autre voie : celle d'une solidarité à l'intérieur des filières, avec la contribution des secteurs les plus profitables au bénéfice des secteurs en danger, notamment dans l'acte de production. Mais ces propositions, faute d'être affinées, faute d'avoir été suffisamment débattues, n'ont pas pu être adoptées. Même si nous ne sommes pas certains de la pertinence de ce modèle économique, ses perspectives nous paraissaient plus heureuses que celles de l'organe de coordination et de régulation que vous allez créer, malgré la constitution d'un pool et une gestion toute social-démocrate. La voie que nous proposions aurait en effet permis d'éviter de donner un trop grand pouvoir aux assureurs privés dont les récentes augmentations de tarifs laissent craindre un système hors de contrôle.
Telles sont les réserves qui nous font choisir l'abstention.
Je rappellerai en conclusion que ce système assurantiel, malgré tous ses mérites, ne doit pas nous distraire de l'impératif de prévention du risque climatique. L'agriculture – le Salon de l'agriculture nous permettra de le vérifier – a plein de solutions à proposer. Nous devons travailler au développement de ces solutions en matière d'agronomie, promouvoir l'adaptation et la bonne gestion de la régulation des énergies renouvelables, en favorisant la méthanisation et le photovoltaïque, pour ne pas concurrencer les productions alimentaires. Il y a là un beau chantier pour la prochaine législature, auquel nous devrons travailler ensemble.