Intervention de Michèle Crouzet

Séance en hémicycle du mardi 22 février 2022 à 21h45
Gestion des risques climatiques en agriculture — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Crouzet :

…conscience de l'adversité climatique, résilience face à ses effets, attention à une juste répartition de son coût. À cet égard, le secteur agricole, et en premier lieu les agriculteurs eux-mêmes, se sont trouvés au cœur de nos préoccupations : je profite de cette occasion pour saluer mon collègue Nicolas Turquois, dont on connaît l'engagement en la matière, et qui n'a malheureusement pu être présent ce soir. Soutenir les exploitants, en effet, c'est se préoccuper de milliers d'hommes et de femmes qui nous nourrissent, assurent notre souveraineté alimentaire, nous garantissent une alimentation de qualité, respectueuse de l'environnement et du bien-être animal, et que nous ne pouvons laisser supporter seuls le coût d'une action collective, celle qui conduit au réchauffement climatique.

Tel est tout l'intérêt de ce texte dont l'enjeu dépasse les logiques partisanes, comme en témoignent l'accord trouvé en commission mixte paritaire et la complémentarité des avancées adoptées par l'Assemblée et par le Sénat. Au nom de mon groupe, je salue l'investissement des rapporteurs, Frédéric Descrozaille et Laurent Duplomb, qui ont permis d'atteindre un équilibre sur bien des points, à commencer par la création d'un régime universel d'indemnisation face aux aléas climatiques. Depuis cinq ans, le coût des sinistres dus à ces évènements a doublé par rapport à la période 2005-2010. Or le système assurantiel des agriculteurs n'était pas au rendez-vous : les indemnisations consécutives à un épisode de sécheresse se sont ainsi fait attendre durant des mois. En outre, en raison de la complexité et du coût de ce système, qui fait coexister deux dispositifs, peu d'agriculteurs se sont assurés ; en somme, les uns se retrouvent sans solution faute d'assurance, les autres mal indemnisés.

Il était donc nécessaire de refonder le système ; c'est désormais chose faite avec ce texte et nous nous en félicitons. Le régime sera structuré en trois étages et la charge en sera partagée entre les agriculteurs, les assureurs et l'État, selon l'impact de l'aléa – courant, significatif ou exceptionnel. L'accord trouvé entre députés et sénateurs a permis de donner une dimension programmatique à cette loi en y inscrivant le budget annuel annoncé par le Président de la République, à hauteur de 600 millions d'euros.

Ensuite, le projet de loi initial proposait d'inscrire la possibilité de remonter le taux de subvention publique à 70 % du montant de la prime pour les contrats garantissant au moins 20 % des pertes de récolte, conformément au règlement européen « omnibus ». Grâce au travail parlementaire, il a notamment été prévu la possibilité de revoir ce taux de subvention à la hausse si le droit européen évoluait en ce sens, mais aussi de laisser à l'agriculteur le choix de la méthode de calcul servant à apprécier sa perte de production, entre moyenne olympique et moyenne triennale glissante.

L'accord trouvé en CMP a également permis d'inscrire dans le texte que le troisième étage du dispositif de couverture des risques, celui assuré par l'État, sera indemnisé à la culture, alors que le deuxième étage pourra être couvert par des contrats à l'exploitation.

Le texte prévoit la création d'un outil majeur, celui d'un pool d'assureurs, afin de mutualiser les données et les risques au sein d'un organisme unique. À notre initiative, a été inscrite l'obligation d'adhésion au groupement des établissements d'assurance qui souhaitent commercialiser l'assurance subventionnée. Il nous paraissait essentiel d'éviter d'exposer ce pool à un risque d'antisélection de la part de certains assureurs.

Enfin, un rapport a été annexé au projet de loi afin de définir, dans le cadre d'une concertation menée au sein du Comité chargé de l'orientation et du développement de l'assurance récolte (CODAR), les scénarios permettant de tirer pleinement profit des possibilités offertes par le règlement « omnibus » mais aussi de différencier les seuils de pertes de récolte ou de culture déclenchant l'intervention de l'État : un seuil de déclenchement de 30 % pour les cultures pour lesquelles les offres assurantielles sont peu développées et de 50 % pour les autres.

Chers collègues, ce projet de loi vise donc à refonder totalement la gestion du risque climatique. Au-delà des dispositifs de soutien proposés, il nous paraît essentiel de favoriser la sensibilisation des agriculteurs à l'intérêt de s'assurer. L'assurance récolte ne doit pas être considérée comme un investissement financier mais bien comme une ceinture de sécurité qui peut sauver une exploitation.

Ce texte s'inscrit pleinement dans notre réflexion d'ensemble sur l'agriculture française. Il s'agit du dernier débat sur ce sujet et nous souhaitons, à cette occasion, saluer l'engagement sans faille de notre ministre Julien Denormandie. Nous voterons bien évidemment en faveur du projet de loi.

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