Je résume : à l'automne dernier, suite à des gels au printemps, à des pluies en été, à des dégâts dans les champs, le président Macron a annoncé une assurance récolte universelle. De quoi affronter les calamités passées et, surtout, les calamités à venir. Mais il ne s'agit aucunement d'une assurance universelle : ce sera une assurance privatisée, une assurance cher payée, une assurance subventionnée. Groupama et Pacifica préviennent déjà : en 2022, le coût de leur assurance récolte va grimper de 15 à 22 %.
Qu'adviendra-t-il des petits producteurs, des petits paysans ? Quentin Bourse, viticulteur en Touraine, à la tête d'un petit domaine de douze hectares, vient d'adresser une lettre ouverte à Emmanuel Macron parce qu'il a appris, le mois dernier, que son assurance récolte passerait de 25 000 à 48 000 euros. « Une augmentation de 90 % », s'étrangle-t-il. Sa banque ne lui laisse que deux options : soit « céder à ce racket écologique en payant une rançon », dit-il, soit l'arrêt immédiat de son activité agricole.
Le texte voté ce soir, qui paraît anodin et technique, révèle en vérité un état d'esprit – et même un esprit de l'État, de votre État macroniste. Même face aux calamités naturelles, même face aux catastrophes en cours, il faut que vous recouriez aux banques, aux assurances, à la finance. Vous êtes incapables d'imaginer, ou plutôt vous ne voulez pas fabriquer, une protection publique face à ces risques, une couverture mutuelle, une entraide entre les agriculteurs et la société. Et le choc climatique doit devenir, pour les fonds de pension et pour les actionnaires, une source de profits.
Surtout, vous posez des sparadraps sur une hémorragie. C'est un bouleversement de notre pays et de notre économie qu'il faut préparer. Et vous êtes là à coller des rustines, des bouts de scotch sur le naufrage du vivant.