Intervention de Christophe Castaner

Séance en hémicycle du mercredi 23 février 2022 à 15h00
Renforcement du droit à l'avortement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Castaner :

Ce matin, à la maison des femmes de Saint-Denis, Ghadah Hatem – que chacun ici connaît – nous parlait de cette jeune femme, cette « petite gamine » a-t-elle dit, qui a découvert sa grossesse à seize semaines d'aménorrhée. Venant du sud de la France, elle s'est retrouvée à Saint-Denis parce que son médecin lui avait dit : « On ne peut rien pour vous ». Il n'a rien dit d'autre que cette phrase froide, cruelle et violente.

C'est à cette « petite gamine » que je veux m'adresser, ainsi qu'aux femmes colombiennes, pour leur exprimer ma fierté de voir aboutir ce texte que nous soutenons depuis de longs mois, né du travail de Cécile Muschotti et de Marie-Noëlle Battistel au sein de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, puis repris par notre collègue Albane Gaillot.

Chacun le sait, sans le groupe La République en marche, ce texte n'aurait pas parcouru un tel chemin : grâce à notre majorité, nous faisons un pas de plus vers l'égalité réelle.

Si la liberté de conscience prime dans notre groupe, comme dans les autres, je salue ceux qui ont veillé à tenir des propos respectueux envers chacun. Nous avons surmonté la stratégie d'obstruction que certains ont adoptée, en particulier pour faire reculer le groupe Socialistes et apparentés lorsqu'il a inscrit le texte à son ordre du jour. Nous avons refusé d'entrer dans un jeu politicien sur un tel sujet – d'autres s'y sont en revanche livrés, à l'Assemblée comme au Sénat. Nous voulions simplement aller de l'avant, et rapidement. C'est la raison pour laquelle nous avons souhaité poursuivre l'examen du texte défendu par Albane Gaillot, alors que nous aurions pu en déposer un nouveau.

Notre engagement en faveur de cette proposition de loi visait un objectif : répondre à des situations dramatiques. Rappelons-le, trop de femmes sont contraintes d'aller à l'étranger pour procéder à une interruption volontaire de grossesse qu'elles ne peuvent pas réaliser en France, soit parce qu'elles se sont aperçues trop tard de leur situation, soit parce qu'elles ont pris leur décision tardivement, soit parce qu'elles n'ont pas eu accès assez rapidement à un professionnel de santé. Notre démarche fait écho au combat que nous menons depuis cinq ans avec la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes : le combat du droit des femmes, de l'accès réel aux droits et du progressisme. Au-delà de l'allongement du délai de douze à quatorze semaines, nous sommes résolument attachés à assurer l'accès réel au droit fondamental qu'est l'avortement.

Aux côtés du Gouvernement, le groupe La République en marche a défendu d'autres avancées essentielles, notamment dans le cadre de la présente proposition de loi. Nous avons ainsi souhaité augmenter le nombre de professionnels susceptibles de pratiquer l'IVG, et garantir aux femmes le libre choix de leur méthode d'avortement ; c'est pourquoi nous ouvrons la pratique de l'IVG chirurgicale aux sages-femmes.

En parallèle, nous avons créé un répertoire des professionnels de santé et des structures qui pratiquent l'interruption volontaire de grossesse. Nous avons le devoir de renforcer la diffusion de ces données, sachant que toutes les femmes n'ont pas un égal accès aux informations et à l'offre de soins. Notre devoir est aussi de lutter contre l'obscurantisme, contre les faux sites internet, contre les faux numéros verts et contre ceux qui attaquent le droit fondamental des femmes à disposer de leur corps. J'entends les critiques de ceux qui considèrent qu'il faut commencer par renforcer l'information sur les moyens de contraception – en réalité, ils préfèrent ne rien faire. J'entends aussi ceux qui trouvent la copie insuffisante, notamment en ce qui concerne la double clause de conscience. Dans les deux cas, cette posture et ce choix politique n'auraient accordé au texte que le plaisir d'un vote, sans volonté d'aboutir. À la posture, nous préférerons toujours l'action.

Nous devons évidemment renforcer l'information, pour que la contraception soit à la portée de toutes et que chacune en connaisse les enjeux. Parallèlement, il faut simplifier et renforcer l'accès à l'avortement. Le groupe La République en marche a d'ailleurs conforté l'accès à la contraception d'urgence dans le présent texte, et l'exécutif a pris des engagements permanents en faveur de la contraception – M. le ministre l'a rappelé.

Toutefois, je le répète : il serait trop simple de croire que parce que la contraception existe, le recours à l'avortement deviendrait inutile. Alors que certains pays durcissent leur législation, je rappellerai ces paroles de Simone de Beauvoir, que nous devons répéter sans relâche pour que nos enfants les gardent en mémoire : « N'oubliez jamais qu'il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » Ces mots, je les répéterai ma vie durant, car, si l'actualité est positive dans certains pays, elle illustre, dans de trop nombreux autres, les risques qui pèsent sur les droits fondamentaux des femmes. Alors que la législature se termine, je suis heureux que mon groupe ait mis son énergie au service de cette proposition de loi, afin que le droit des femmes soit conforté, affirmé et renforcé.

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