Intervention de Jean-Pierre Door

Séance en hémicycle du mercredi 23 février 2022 à 15h00
Accès universel à la vaccination — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Door :

La propagation de covid-19 est la première à être causée par un coronavirus et elle met en danger tous les habitants de la planète. Selon l'Organisation mondiale de la santé, l'épidémiologie mondiale actuelle du SRAS-CoV-2 se caractérise par la poursuite de la propagation mondiale rapide du variant omicron. Tous les autres variants continuent de diminuer dans les six régions de l'OMS.

La vaccination constitue l'action de santé publique la plus efficace et la plus rentable pour sauver des millions de vies et la mise au point d'un vaccin, dans un délai de moins de dix mois, contre un virus inconnu, grâce à une technologie nouvelle, a constitué à l'évidence une prouesse technologique sans précédent. Beaucoup de vaccins ont en effet nécessité des années de mise au point.

Les vaccins ont pu tenir leur promesse, c'est-à-dire sauver des vies, offrir une protection très élevée contre les formes graves de la maladie et éviter des décès. On peut se réjouir aujourd'hui de l'évolution positive du futur vaccin Sanofi, purement français. Cependant, la pandémie est un révélateur et un accélérateur des inégalités, de la pauvreté et de l'insécurité dans les pays et territoires vulnérables ou fragiles. Selon le directeur général de l'OMS : « Si nous mettons un terme à l'inégalité vaccinale, nous pouvons mettre fin à la pandémie. Si nous permettons à cette inégalité de persister, nous permettons à la pandémie de perdurer. » Les pays d'Amérique du Nord et d'Europe de l'Ouest affichent des taux de vaccination de leur population supérieurs à 50 %. Les pays du Sud et les pays africains, de leur côté, peinent à vacciner leurs populations.

Pour mettre fin à la pandémie, il faut vacciner le monde entier. Or plus de 75 % de tous les vaccins ont été administrés dans seulement dix pays. À peine 7 % des habitants des pays à faible revenu ont reçu une dose de vaccin : seulement 11 % des Africains, par exemple, ont reçu au moins une dose à ce jour. Les pays pauvres et émergents étant confrontés à la faiblesse de leur système de santé, seule la solidarité vaccinale permettra d'agir contre le développement et la propagation de nouveaux variants. C'est pourquoi la facilité COVAX a été mise en place en 2020.

La proposition de résolution n° 4175 portant sur la levée temporaire des brevets sur les vaccins, déposée l'an dernier par le groupe La République en marche, constatait l'impossibilité de vacciner 70 % de la population mondiale d'ici à 2021. La présente proposition de loi de la majorité reprend le même constat, alors que ce délai a pourtant malheureusement été dépassé. En complément de la levée temporaire des brevets, elle demande la construction de sites de production dans les pays les moins favorisés.

Or la majorité tient un double discours tout à fait incompréhensible. D'un côté, le Président Emmanuel Macron s'était prononcé, en amont du sommet des chefs d'État du G7 de juin 2021, pour une levée des brevets des vaccins anticovid. De l'autre, le ministre délégué au commerce extérieur a récemment affirmé la volonté de « faciliter encore l'accès aux licences volontaires, aux licences obligatoires qui existent déjà […] de la manière la plus constructive possible ».

La levée des brevets requiert au demeurant un vote à l'unanimité des 164 membres de l'Organisation mondiale du commerce. La présente proposition de résolution, déposée l'an dernier, n'est plus en phase avec l'actualité des conférences internationales. Depuis son dépôt, l'Union européenne et l'Union africaine ont en effet scellé, vendredi dernier, un « partenariat rénové » prévoyant notamment le lancement d'une stratégie européenne d'investissements de 150 milliards d'euros et une aide accrue pour produire des vaccins anticovid en Afrique. Par ailleurs, l'OMS vient de désigner les six premiers pays bénéficiaires d'un programme mondial de fabrication de vaccins à ARN messager, à savoir l'Afrique du Sud, l'Égypte, le Kenya, le Nigeria, le Sénégal et la Tunisie. L'objectif est qu'en 2040 l'Afrique puisse fabriquer elle-même 60 % des vaccins dont elle a besoin.

La dernière phrase de l'exposé des motifs, difficilement compréhensible, ne formule plus désormais qu'un vague soutien aux initiatives scientifiques et techniques de lutte contre la pandémie – c'est presque une tautologie ! Elle est désormais satisfaite, s'agissant du continent africain, par le sixième sommet entre l'Union européenne et l'Union africaine.

La résolution déposée en application de l'article 34-1 de la Constitution est, en principe, un acte par lequel l'Assemblée émet un avis sur une question déterminée. Or il nous est proposé d'émettre un avis a posteriori. La proposition de résolution est ainsi largement devenue sans objet. C'est pourquoi le groupe Les Républicains ne la votera pas.

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