Intervention de Alain David

Séance en hémicycle du mercredi 23 février 2022 à 15h00
Dénonciation du coup d'État militaire en birmanie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain David :

C'est dans un contexte particulier qu'est examiné en séance le dernier texte de la législature suivi par la commission des affaires étrangères. S'il me tient évidemment à cœur, puisque je préside le groupe d'amitié France-Birmanie, il peut sembler surprenant, voire décalé, d'évoquer des sujets aussi lointains alors que des combats ont lieu à l'est de l'Europe. Mes collègues du groupe Socialistes et apparentés ont évidemment saisi l'occasion du récent débat sur le Sahel ou des séances de questions au Gouvernement pour évoquer la dramatique situation en Ukraine. Vous comprendrez que je ne pouvais pas monter à cette tribune sans y faire moi-même référence.

Pour revenir à la question qui nous occupe, je rappelle qu'au cours de cette législature riche en événements, j'ai eu l'occasion d'accueillir, avant le coup d'État de l'année dernière, une délégation d'élus birmans. Nos échanges avaient été particulièrement fructueux. À l'aube d'élections qui s'annonçaient comme un nouveau pas vers une démocratie plus affirmée, nous avions évoqué le déplacement d'une délégation du groupe d'amitié à Rangoon. Les préparatifs étaient prometteurs. Hélas, la pandémie de covid-19, puis le coup d'État, ont contrarié nos plans et nous n'avons pas pu nous rendre sur place.

Cela ne nous a pas empêchés de suivre de près la situation en Birmanie, qui a été abordée tant en séance – à l'occasion des séances de questions au Gouvernement – qu'en commission, au cours de plusieurs auditions du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Nous avons également eu la chance de travailler étroitement avec des membres de la communauté birmane en France et de recevoir des membres du Gouvernement d'unité nationale de passage dans notre pays. Ce texte constitue donc l'aboutissement d'un long travail préparatoire. Je remercie Anne Genetet et Michel Herbillon pour leur opiniâtreté, qui a permis son inscription à l'ordre du jour des travaux de l'Assemblée nationale.

Cette proposition de résolution est l'occasion de réaffirmer que la représentation nationale se tient aux côtés des Birmans, au nom de la défense de leurs droits et de leurs libertés. Rappelons une nouvelle fois que le coup d'État a très rapidement conduit à l'arrestation de centaines de personnes, dont le Président de la République U Win Myint et la conseillère d'État Aung San Suu Kyi. Nous contestons évidemment le transfert de l'ensemble des pouvoirs au commandant en chef des forces armées et la proclamation de l'état d'urgence pour un an. Nous déplorons également l'annulation du résultat des élections générales du 8 novembre 2020, l'interdiction des chaînes d'information étrangères, ainsi que le blocage d'internet et des réseaux sociaux.

Cet effondrement de l'État de droit constitue pour la Birmanie une inversion désastreuse du cours de son histoire. À l'occasion des élections générales du 8 novembre 2020, les électeurs birmans avaient en effet donné une victoire écrasante à la Ligue nationale pour la démocratie, dirigée par Aung San Suu Kyi – qui a emporté 81 % des sièges à la chambre basse du Parlement, soit davantage qu'en 2015 –, sur le Parti de l'union, de la solidarité et du développement (PUSD), héritier du régime militaire. Ce scrutin, dont l'organisation et le caractère libre avaient été salués par des observateurs nationaux et internationaux, devait constituer une étape supplémentaire vers la démocratisation durable de la Birmanie. Il a, au contraire, été contesté par les forces armées qui, craignant de perdre définitivement pouvoir et influence, ont finalement préféré imposer leur gouvernement par la force.

Jusqu'à présent, la junte a fait peu de cas des alertes de la communauté internationale. Face aux manifestations pacifiques chaque jour plus importantes et disséminées sur le territoire, elle a fait usage de la violence et tiré à balles réelles afin d'étouffer les revendications de la population.

Dans ce contexte, la proposition de résolution vise à ce que l'Assemblée nationale française prenne toute sa part dans la dénonciation de faits d'atteinte à la démocratie et aux droits d'un peuple. À ce jour, la France est l'un des rares pays, avec la République tchèque et le Canada, à avoir amorcé un processus de reconnaissance du Gouvernement d'unité nationale birman en exil : le Sénat a ainsi adopté une résolution en ce sens le 5 octobre dernier. Il convient désormais d'acter, grâce à cette résolution, que l'Assemblée nationale appelle également la France, l'Union européenne et les organisations internationales à ne plus considérer les membres de la junte comme des représentants légitimes de la Birmanie.

Pour toutes ces raisons, avec mes collègues Socialistes et apparentés, nous voterons évidemment ce texte et nous invitons le Gouvernement à s'engager en faveur des sept points de la proposition de résolution.

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